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Pourquoi les lycéens descendent-ils dans la rue depuis cinquante ans ?

Les lycéens dans la rue, des dizaines de lycées bloqués contre la réforme du bac ou contre Parcoursup… Historiquement, qu’est-ce qui fait descendre les lycéens dans la rue ?

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Manifestation de lycéens place de la République à Paris, vendredi 7 décembre. (ALEXIS SCIARD  / MAXPPP)

Oublions ceux qui y voient un bon moyen de rater un contrôle de maths ou ceux, et c’est moins drôle, qui en profitent pour casser ou voler. Les lycéens descendent dans la rue depuis une cinquantaine d’années. Il y avait déjà eu quelques mouvements en 1967 et janvier 1968, avec les Comités Vietnam lycéens. Mais c’est surtout en mai 1968 qu’ils ont expérimenté à leur tour manifestations et blocages des lycées.

Les grandes années d'engagement politique (1968-1973)

Nettement moins massivement que leurs aînés étudiants, mais tout de même, les Comités d’Action lycéens, les CAL, nouveauté de Mai-68, mettent jusqu’à 10 000 lycéens dans les rues lors de la manifestation du 10 mai. Cet évènement ouvre une parenthèse de quelques années d’agitation très politique dans les lycées, où les "gauchistes" et les communistes rivalisent pour mobiliser les élèves, et y réussissent en 1971 en soutien à un élève arrêté injustement par la police, la fameuse affaire Guiot.

Mais le très grand mouvement, le "mars lycéen" dont parle les journaux, c’est pour l’année 1973, contre la fin des longs sursis pour le service militaire. Ainsi relate-t-on dans le journal de France Inter du 21 mars 1973 : "Aujourd'hui, la quasi totalité des établissements parisiens a été touché par la grève et de nombreux lycées et collèges de banlieue et de province étaient également atteints par le mouvement."

La "Bof génération"'

Après quelques années d’activisme, systématiquement contre les réformes de la scolarité en 1974, 1975 et 1976, à la fin des années 1970, presque brusquement, les lycéens entrent dans une forme d’apathie. Le Nouvel Observateur trouve même un nom à ce qui se joue en titrant sur la "Bof génération", profondément dépolitisée et qui subit le monde plutôt qu’elle ne souhaite le changer, et dont le succès d’Alain Souchon est présenté à la télévision comme l’incarnation. "Mes parents me disaient tout le temps : 'Mais enfin, tu ne t'interesses à rien, tu traînes toute la journée'. Et c'est vrai que je m'interessais à rien", explique le chanteur. 

Un nouvel engagement depuis le milieu des années 1990

Outre les grandes manifestations contre la loi Devaquet de 1986, rien ou pas grand-chose avant le milieu des années 1990. Cette "Bof génération" se remobilise en 1994 contre le smic Jeune, symbole d’une génération inquiète pour son avenir dans un contexte économique très morose. La barre des trois millions de chômeurs vient d’être franchie. Apparaît alors un nouveau syndicat, l’Union nationale lycéenne, moins idéologique que les syndicats qui existaient jusqu’alors et qui va, avec d’autres, depuis maintenant près de 25 ans mobiliser fréquemment les lycéens autour de trois combats : la défense des moyens, le rejet de la sélection, et  plus largement la crainte de l’avenir, qui les fait manifester aux côtés des adultes contre la loi Travail ou aujourd’hui aux côtés des "gilets jaunes".

C’est souvent le cas avec les mouvements lycéens, il est très difficile de dire ce que deviendra ce mouvement. Et comme disait Jacques Chirac : "Les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu’elles concernent l’avenir."

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