"La bonne âme du Sé-Tchouan", par Jean Bellorini
Jean Bellorini fait le contraire de ce que recommandait
Brecht. Ici, pas de distanciation des comédiens, qui incarnent à fond leurs
personnages, notamment la lumineuse Karyll Elgrichi qui est à la fois Shen-té,
cette prostitué à qui les Dieux donnent pour mission d'être la bonne âme qui va
sauver la miséreuse province du Sé-Tchouan et Shui Ta, son double masculin, qui
met bon ordre aux débordements de générosité de la jeune fille.
Forcer le trait de Brecht
Ce qui fonctionne bien c'est le théâtre choral, le sens de
la troupe, dans un univers de bas quartiers avec triporteur, boutiques
délabrées, lampions et orchestre... Jean Bellorini n'hésite pas à forcer le trait
manichéen de Brecht.
Bertolt Brecht, l'ami du peuple, joué en 2013 devant le chic
public du théâtre de l'Odéon. Un décalage. Comme souvent, c'est vrai, les
tirades face public dénonçant l'indifférence à la misère sont assez cocasses. Ce
qui est amusant ici c'est que Jean Bellorini vient d'être nommé à la direction
du théâtre Gérard Philippe à St Denis, le TGP, et qu'il devait à l'origine y
jouer cette pièce.
Le centre dramatique de Saint Denis est l'un des symboles
avec Nanterre des utopies de décentralisations culturelles des années 80, avec
ses réussites et ses échecs.
Christophe Rauck qui laissera sa place en
septembre 2014 a redressé
les finances, ouvert le théâtre à une population qui s'en sent éloigné. Jean
Bellorini a parfaitement conscience des enjeux qui l'attendent.
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