Qui était vraiment Jeanne d’Arc ? France 2 mène l’enquête dans un docu-fiction animé
Romancier, journaliste, réalisateur et documentariste, Antoine de Meaux a déjà réalisé de nombreux documentaires pour la télévision comme sur l’écrivain Louis-Ferdinand Céline, l’acteur Philippe Noiret et a signé 18 numéros de l’émission "Secrets d’histoire" présentée par Stéphane Bern. Mardi 19 décembre à 21h10 sur France 2, le journaliste propose un docu-fiction sur Jeanne d’Arc : L'affaire Jeanne d'Arc, mais sans comédiens, uniquement des images en 3D.
franceinfo : Dans un docu-fiction, tout est vrai, mais on y ajoute quelques éléments fictionnels sans trahir le sujet.
Antoine de Meaux : Oui, tout est vrai, surtout que c'est vraiment un documentaire à part entière. Le but est de raconter l'histoire de Jeanne d'Arc, en puisant directement aux sources, en faisant entendre la voix de Jeanne d'Arc que l'on connaît grâce aux minutes de son procès de 1431, où elle a répondu à ses juges.
"On connaît ses paroles qui nous font deviner sa personnalité. C'est un matériau extraordinaire qui a déjà été utilisé, notamment au cinéma."
Antoine de Meauxà franceinfo
On se sert aussi de très nombreux témoignages qui ont été recueillis au moment du procès en réhabilitation, 25 ans après sa mort, par les enquêteurs que nous suivons et qui mènent une enquête sur ses traces. Tous ces personnages, ils sont plus d'une centaine, nous racontent Jeanne d'Arc. Ce sont ses amis d'enfance à Domrémy, ses compagnons d'armes qui l'ont accompagné à travers toute la France. Ce sont les conseillers du roi Charles VII, ou ce sont les juges survivants qui l'ont jugée à Rouen, 25 ans plus tôt, et qui ne se sentent pas très bien suite à ce qui lui est arrivé finalement.
Tout est réel et vous êtes entourés d'historiens ?
Alors oui, bien sûr. J'ai lu évidemment toute l'extraordinaire bibliographie récente, renouvelée, qui existe sur Jeanne d'Arc. J'ai aussi demandé des conseils à une formidable historienne, qui s'appelle Valérie Toureille, qui est l'auteure d'un Jeanne d'Arc qui a été salué par tout le monde en 2020. Sa Jeanne d'Arc est une femme d'abord très jeune.
"N'oublions pas qu'elle avait 17 ans quand elle a fait irruption sur la scène de l'histoire et 19 quand elle meurt. C’est une résistante. C'est une figure de liberté."
Antoine de Meauxà franceinfo
Cela m'a intéressé de pouvoir revenir à elle, revenir à la source, de faire redécouvrir cette Jeanne d'Arc qu'on a un peu tendance à oublier tellement elle est devenue une image d'Épinal.
La fiction animée sert-elle aussi à intéresser un public autre que des passionnés d'histoire, et les jeunes notamment ?
Le but, c'est de proposer sur le service public, sur France 2, un grand spectacle exceptionnel.
"Une soirée comme on en a très peu dans l'année et qui fédère toute la famille, des plus jeunes jusqu'aux plus âgés, qui est à la fois un documentaire et, en même temps, un film qui emporte comme une fiction."
Antoine de Meauxà franceinfo
L'animation 3D est une esthétique qui correspond à notre époque, c'est celle de dessins animés, c'est celle de la bande dessinée, c'est celle du jeu vidéo. On est en fait imprégnés de cette esthétique-là. Elle n'a pas encore forcément ses lettres de noblesse, elle n'est pas encore à l'Académie française, si j'ose dire, mais c'est vraiment notre époque. Et ça nous a intéressés de puiser dans ce répertoire visuel qui est la culture populaire de notre époque pour faire un film ultra-rigoureux, ultra-border sur le plan historique, mais en même temps qui emporte, qui passionne. Qu'on ne lâche pas, qui a le temps et qui nous raconte la véritable histoire de Jeanne d'Arc. Parce que l'histoire de Jeanne d'Arc est passionnante et c'est ça que nous nous faisons fort de démontrer à nouveau au public d'aujourd'hui.
On connaît Jeanne d'Arc comme la Pucelle d'Orléans, habillée en homme, brûlée vive sur le bûcher. Cela va rarement plus loin. Mais vous, non seulement vous retracez sa vie, mais vous évoquez un épisode assez peu connu, qui est son procès en réhabilitation. Le point de départ, c'est un jeune homme, un religieux qui va enquêter sur elle. C'est un personnage que vous avez inventé ?
En fait, cette enquête sur Jeanne d'Arc a vraiment eu lieu. C'est le procès en réhabilitation, 25 ans après sa mort. Celui qui mène ce procès, c'est Jean Bréhal, l'inquisiteur de France. Un personnage qui a existé et dont on sait quelle était la personnalité. C'était un Normand, un homme qui était plutôt dans le camp du roi de France. Il était, au fond, passionné par Jeanne et voulait lui rendre justice. Mais effectivement, le seul personnage imaginaire du film est en face, un jeune homme qui s'appelle Pierre Fournier, un jeune moine. C'est un interlocuteur un peu candide, mais en même temps ayant suffisamment d'autorité pour répondre à ce puissant inquisiteur. Les deux vont mener l'enquête sur les traces de Jeanne.
"Cette idée d'enquête, c'est comme un cold case. On rouvre un dossier 25 ans après que l'affaire a eu lieu et on essaie de comprendre ce qui a pu se passer à l'époque."
Antoine de Meauxà franceinfo
Et ce mécanisme de l'enquête a vraiment eu lieu puisque ce procès a vraiment eu lieu. On le suit, en le respectant d'une façon extrêmement rigoureuse. Ça nous permet de déminer cette histoire de Jeanne d'Arc, qui reste très mystérieuse. Jeanne d'Arc est un des personnages les mieux documentés de l'histoire du Moyen Âge et en même temps, elle garde encore sa part de mystère.
Pourquoi avoir choisi Laurent Stocker de la Comédie-Française pour la narration ? Comment l'avez-vous embarqué dans cette aventure ?
Il nous fallait une voix charismatique. Il nous fallait un personnage qui soit capable d'être à la hauteur de ce personnage assez complexe, Pierre Fournier. Et bien sûr, on a pensé à quelqu'un de la Comédie-Française et un des plus admirables de tous, Laurent Stocker. C'est une voix extraordinaire, c'est un magicien. Enregistrer avec lui les voix, ça a été un moment de bonheur absolu, de voir sa science, sa façon de s'emparer du personnage, d'apporter des petites nuances, de nous emmener, de nous prendre par la main. Et puis, je crois que la télévision française a toujours aimé faire appel à la Comédie-Française quand il s'agissait de défendre un programme de qualité. Ça fait partie de toutes nos grandes institutions. Jeanne d'Arc fait partie des monuments de l'histoire de France. Laurent Stocker fait partie des monuments du théâtre français, c'était normal qu'on le mobilise avec vous.
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