Entre la presse et les Bleus, "je t'aime, moi non plus"
Elle jauge, elle juge et elle semble prompte parfois à passer des félicitations au blâme. La presse française, en cette période de Mondial, ne fait pas dans la demi-mesure. Lorsque les Bleus s'offrent un 5-2 face à la Suisse, c'est l'avalanche de compliments à la Une des quotidiens. Les Bleus étaient "impressionnants" , "séduisants" , "vertigineux" , selon les titres. "Ces Bleus-là on les aime" écrivait le Parisien. Mais un match nul face à l’Équateur plus tard, et la presse se fait presque boudeuse : "service minimum" , "laborieux" , "barbant" ,"match vraiment nul" ... On sent qu'il ne faudrait pas grand chose pour que les Bleus portés aux nues ne soient descendus en flamme. Il y a quatre ans, la presse n'avait pas eu de mots assez durs pour évoquer l'élimination des Bleus en Afrique du Sud, comme ce "Tchao pantins" à la Une du journal Le Progrès.
"Une dramatisation du football"
"Les médias ont facilement l'habitude d'être dithyrambique quand il s'agit du sport, surtout en France" note Patrick Mignon, sociologue à l'INSEP. "En Italie, en Espagne, il y a une dramatisation forte autour du football, ça fait partie de la comédie du football. Mais en France, c'est différent : le pays n'a pas une ferveur footballistique extraordinaire, ça n'existe qu'au moment du Mondial. Du coup, il y a une mobilisation des adjectifs, pour rendre l'événement encore plus attractif."
Le sport, "une fabrique de héros"
Patrick Mignon note que le vocabulaire des journalistes sportifs a évolué : "très technique au départ, il est devenu plus accessible, plus grand public à mesure que le sport était populaire, grâce notamment à la télévision." Mais pour les médias, le sport a toujours été "une fabrique de héros" .
Les Bleus ont une place à part, qui dépasse même le cadre du sport : "Il y a en France trois grandes dates désormais pour le football : 1998 c'est la grande émotion, avec un vocabulaire qui sort du domaine sportif, avec l'intégration, la France black-blanc-beur. 2010, c'est la grande honte collective. Et 2014 incarne l'espoir."
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