Édito
Immigration : en Europe, la pression politique explique la surenchère législative

Cinq mois seulement après l'adoption du pacte sur l'immigration, les leaders européens se penchent déjà, jeudi à Bruxelles, sur un nouveau durcissement de la politique migratoire. Poussées notamment par les partis d'extrême droite, en progression dans de nombreux pays d'Europe, ces questions reviennent au premier plan.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (à gauche) et Le chancelier allemand Olaf Scholz (à droite) lors d'une cérémonie de signature d'un accord à la Chancellerie, à Berlin, en Allemagne, le 14 octobre 2024. (MICHELE TANTUSSI / POOL / MAXPPP)

L’immigration s’impose comme une priorité pour le gouvernement français comme pour ses homologues européens. Le gouvernement Barnier vient d’annoncer une nouvelle loi pour le début 2025, à peine un an après la précédente, et le dossier est au cœur du Conseil européen qui s’ouvre jeudi 17 octobre à Bruxelles. Les deux dimensions, française et européenne, se rejoindront vendredi du côté de la frontière franco-italienne puisque Michel Barnier, flanqué de Bruno Retailleau, y rencontreront les ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur italien du gouvernement Meloni. Partout en Europe, les gouvernements, de droite, d’extrême droite, mais aussi de gauche, comme en Allemagne, partagent la même préoccupation, celle de mieux contrôler la frontière pour lutter contre l’immigration illégale. 
 
Le sujet s’impose comme l’une des principales préoccupations des opinions, ce qui se traduit par une poussée électorale spectaculaire de l’extrême droite, on vient encore de le voir aux régionales en Allemagne et aux législatives en Autriche. Cette pression politique explique la surenchère législative. En France, on s’apprête donc à enchaîner loi Darmanin et future loi Retailleau. En Europe, le pacte Asile et migration tout juste adopté n’est pas encore entré en application, c’est pour 2026, qu’Ursula von der Leyen envisage d’aller plus loin et évoque des "solutions innovantes", peut-être des expulsions de migrants illégaux vers des pays tiers, ou l'externalisation des procédures d’asile hors d’Europe, comme le fait l’Italie en l’Albanie. Le modèle de Giorgia Méloni fait école et inspire aussi bien la Comission européenne que Bruno Retailleau, qui veut avoir des discussions avec certains pays tiers.

Ni forteresse, ni passoire 

Ce nouveau tour de vis de la Commission européenne intervient alors que de nombreux pays, la Hongrie, la Finlande, les Pays-Bas, sont tentés de s’exonérer du droit européen en matière d’immigration. Une tentation qui avait tenaillé le Michel Barnier d’avant, celui de la primaire présidentielle de LR, qui prônait de s’affranchir des règles européennes pour retrouver notre "souveraineté juridique". La Commission tente donc de reprendre la main. Sans grand espoir d’éteindre les deux injonctions opposées, brandies par les radicaux des deux camps, qui enflamment le débat public et sont aussi fausses l’une que l’autre. Non, l’Europe n’est pas une forteresse cadenassée et fermée à double tour à toute immigration.

L’UE accorde, en moyenne, chaque année plus de 3 millions de nouveaux permis de séjour, dont plus de 300 000 pour la France, des chiffres auxquels il faut ajouter plus d’un million de demandeurs d’asile pour le continent. Et non, au regard des 450 millions de personnes qui vivent dans les 27 États-membres de l’UE, dont 68 millions dans l’hexagone, ni l’Europe, ni la France ne sont menacées de "submersion migratoire", la grande peur attisée par Marine Le Pen.

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