Édito
Nomination du nouveau Premier ministre : qui a trahi le front républicain ?

Depuis la nomination de Michel Barnier, jeudi, au poste de Premier ministre, la gauche crie au scandale démocratique, mettant en avant le fait qu'elle est arrivée en tête des législatives. En réalité, pour décrocher Matignon et prendre les rênes du gouvernement, le Nouveau Front populaire devait s’ouvrir, ce qu'il n'a pas souhaité faire.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un rassemblement populaire place de la République au soir du second tour des 
élections législatives, à Paris, le 7 juillet 2024. (LP / FRED DUGIT / MAXPPP)

Un Premier ministre de droite, Michel Barnier, nommé grâce à la bienveillance de Marine Le Pen qui pourrait ne pas le censurer, voilà qui fâche la gauche. le Nouveau Front populaire hurle, depuis jeudi 5 septembre, au déni de démocratie. Jean-Luc Mélenchon accuse "le monarque Macron" de "voler l’élection au peuple", et la gauche répète qu’elle dispose du plus gros bloc de députés. Bon. Il est vrai que voir entrer à Matignon un membre de la droite républicaine, qui n’a jamais eu aussi peu de députés de toute la Ve République, seulement 47, ça a quelque chose d’incongru. Surtout avec la bénédiction tacite du RN. Écarté du pouvoir par le Front républicain, le parti lepéniste a donc retrouvé un rôle décisif d’arbitre.
 
Emmanuel Macron a-t-il tué le Front républicain comme l’en accuse la gauche ? Non. Depuis deux mois, beaucoup, dont le chef de l’État, l’ont parfois malmené et affaibli, c’est vrai, mais le premier qui a trahi le Front républicain, c’est le Nouveau Front populaire. C’est Jean-Luc Mélenchon qui lui a asséné le premier coup, fatal, le 7 juillet à 20 heures 5, quand l’insoumis a revendiqué la victoire pour la gauche toute seule. Et qu’il a clamé que celle-ci appliquerait le programme du NFP, tout le programme du NFP et rien que le programme du NFP.

Pour décrocher Matignon et prendre les rênes du gouvernement, la gauche devait s’ouvrir. Il lui manque une centaine de députés pour atteindre la majorité absolue. Elle devait donc tendre la main au bloc central, voire à la droite républicaine, annoncer qu’elle amenderait son projet pour bâtir une large coalition. Elle a fait tout le contraire ! Olivier Faure s’est rangé derrière Jean-Luc Mélenchon et les socialistes ont même sabordé les chances de Bernard Cazeneuve. La gauche a répété pendant des semaines que ce serait Lucie Castets ou rien. C’est donc… rien.

L'intransigeance du Nouveau Front populaire

Désormais, elle ne peut pas vraiment peser. La gauche peut manifester dans la rue, comme le feront les Insoumis samedi, accuser Emmanuel Macron de collusion avec Marine Le Pen et même engager une procédure de destitution du chef de l’État vouée à l’échec. Mais par son intransigeance, le Nouveau Front populaire s’est condamné à assister à l’Assemblée à un film dont le scénario va s’écrire sans lui. Le sort de la motion de censure que va déposer le NFP ne dépend d’ailleurs que de l’attitude du groupe RN. Bref, tant que Jean-Luc Mélenchon dictera à la gauche la marche à suivre, celle-ci semble condamnée à rester dans l’opposition. Et les fossoyeurs du Front Républicain continueront de dérouler le tapis rouge à Marine Le Pen.

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