Menace de motion de censure : le naufrage de l’Assemblée nationale

L'Assemblée nationale se prononce lundi sur budget de la Sécurité sociale, avec la possibilité d'un recours au 49.3 et déjà la perspective d'une motion de censure de la part de la gauche et du Rassemblement national. Le renouveau du parlementarisme, espéré après les législatives anticipées, n'a pas vu le jour.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, le 26 novembre 2024. (ALEXIS SCIARD / MAXPPP)

Cette première semaine de décembre est décisive pour Michel Barnier, sous la menace d’une motion de censure qui pourrait faire tomber son gouvernement. Ce serait bien sur l’échec du Premier ministre, mais aussi l’illustration du naufrage de l’Assemblée nationale. Il y a cinq mois à peine, le résultat des législatives et l’absence de toute majorité, annonçait pour beaucoup un renouveau du parlementarisme. Emmanuel Macron battu, le pouvoir quittait l’Élysée et franchissait la Seine pour s’installer au Palais-Bourbon. L’extrême droite avait échoué aux portes de Matignon et dans des circonstances politiques aussi décisives, on se prenait à rêver de députés capables de dialoguer, parfois de bâtir des compromis. Bref, des parlementaires responsables, comme dans d’autres démocraties occidentales majeures.

II s’est produit l’inverse. Tous les groupes ont rivalisé d’irresponsabilité pour dessiner la catastrophe politique et financière qui se profile. Avec une mention spéciale pour Marine Le Pen dont le chantage prend ces dernières heures un tour risible. Elle brandit d’infranchissables "lignes rouges", puis prétend vouloir négocier, puis dit que c’est Michel Barnier qui ne veut plus, puis elle le somme de désavouer l’un de ces ministres… Bref, "c’est pas moi, c’est lui" ou "c’est-çui qui dit qui y est" ! Une vraie cour d’école. En matière d’enfantillages, la gauche n’est pas en reste. Plutôt que d’amender le budget avec sérieux, elle l’a défiguré en gonflant la facture fiscale de plusieurs dizaines de milliards d’impôts, une addition évidemment balayée par le vote final d’une majorité de députés. Quant à Laurent Wauquiez et Gabriel Attal, engagés dans une rivalité tout aussi puérile, ils ont passé leur temps à tirer dans les pattes du Premier ministre qu’ils sont supposés soutenir chacune de leurs critiques faisant la pédagogie de la censure à venir.

L'absence de plan B


En cas de censure, à quoi ressemblera le jour d’après ? Nul n’en sait rien. Il n’y a pas de plan B. Chaos financier ? Blocage politique ? Voire, histoire d’ajouter un peu plus de désordre et de tension, une présidentielle anticipée ? La seule chose certaine, c’est que les députés ne veulent pas exercer le pouvoir que le résultat des législatives leur a octroyé.

Les députés peuvent d’autant plus voter la censure sans se soucier du lendemain que pour eux, c’est sans risque : le Président ne peut pas dissoudre ! Bientôt panthéonisé, l’historien Marc Bloch expliquait, à propos de la faillite des élites politiques de la IIIe République, à la veille du juin 1940 : "Le parlementarisme a trop souvent favorisé l’intrigue aux dépens de l’intelligence ou du dévouement. Une chambre gouvernante se voue au chaos dès qu’elle accepte d’être une foule". Nous y sommes.

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