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Édito
Mort de Lola à Paris : s'emparer d'un fait-divers, pas une première pour l'extrême droite
L’extrême droite s’est emparée du meurtre de la petite Lola à Paris pour mettre en cause la politique d’immigration du gouvernement… L'édito de Renaud Dély.
"Trop de crimes sont commis par des immigrés clandestins qu’on n’a pas voulu ou pas su renvoyer chez eux !". Voilà ce qu’a balancé mardi 18 octobre Marine Le Pen en interpellant Elisabeth Borne.
Pas de délai de décence, donc : la petite victime n’est pas encore enterrée, mais la politique n’attend pas. Le monde politique s'est emparé mardi de l'affaire de cette adolescente de 12 ans assassinée dans des conditions atroces, alors que, quatre jours après la découverte du corps dans une malle à Paris, Emmanuel Macron a reçu ses parents mardi à l'Elysée.
Il faut dire qu'il y a de la concurrence à l’extrême droite. Eric Zemmour a carrément dénoncé "un francocide de plus !", comme si la fillette avait été tuée parce que Française. Et son mouvement Reconquête a lancé une vigoureuse offensive sur Internet pour mobiliser appeler à manifester ce soir devant la mairie du XIXè arrondissement de Paris.
Une façon de passer à autre chose
Ce n’est pas la première fois que l’extrême droite polémique à propos d’un fait divers. Au contraire, même : c’est un grand classique. Dès les années 1970, Jean-Marie Le Pen s’emparait des meurtres commis par des étrangers pour fustiger l’immigration. Et, déjà, à l’époque, on voyait certains responsables de droite embrayer sur le même thème.
Même chose aujourd’hui. Les sujets économiques et sociaux divisent les élus LR et ceux du RN, mais l’insécurité et l’immigration les rapprochent. Marine Le Pen se sert donc de ce drame comme d’un appeau pour attirer à elle ce qui reste de la droite. Et puis, ce fait-divers lui permet de tourner la page des grèves, un sujet social qui la met mal à l’aise : difficile pour le RN d’être à la fois du côté des grévistes des raffineries et des automobilistes mécontents.
>> Mort de Lola à Paris : ce que l'on sait de l'enquête et de la principale suspecte
Il n’empêche que la principale suspecte était bien en situation irrégulière, sous le coup d’une OQTF, une obligation de quitter le territoire français depuis fin août. Or, moins de 10 % de ces OQTF sont aujourd’hui suivies d’effets. A cause de procédures longues, complexes, et parce les pays d’origine rechignent à accueillir leurs ressortissants. C’est justement pour çà qu’en rétorsion, Emmanuel Macron a réduit de moitié le nombre de visas délivrés à l’Algérie. Mais dans le cas présent, la suspecte, entrée régulièrement en France il y a six ans, n’avait jamais été ni condamnée, ni même poursuivie. Ce qui explique que son titre de séjour étant périmé, elle bénéficiait d’un délai de retour volontaire de 30 jours. Elle ne s’y est donc pas pliée. Est-ce à dire que l’enchaînement des événements était inéluctable ? Bien sûr que non. La gestion du réel est toujours plus complexe que la vocifération de slogans démagogiques à des fins électorales.
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