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L'artiste Boris Eldagsen révèle que sa photo, récompensée par un Sony Award, est l'œuvre d’une IA et veut ouvrir le débat

Il annonce refuser le prix qui lui a été décerné par le jury des Sony World Photography Award arguant que l'œuvre qu'il a proposé n'était pas une vraie photo mais une image fabriquée par une intelligence artificielle. Il espère ainsi lancer le débat sur l’intrusion des IA dans le monde de l'art.
Article rédigé par franceinfo, Marion Lagardère
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Image générée par une intelligence artificielle, intitulée "Pseudomnesia : The Electrician". (BORIS ELDAGSEN)

Boris Eldagsen, 53 ans, est Allemand, cela fait trente ans qu'il fait de la photographie d'art, des montages psychédéliques et fantasmagoriques, et il vient de remporter un prix aux prestigieux Sony World Photography Award dans la catégorie créativité. L'œuvre primée est un portrait en noir et blanc de deux femmes que l'on croirait tout droit sorties des années 1940 : l'une est jeune, le regard intense, profond, tourné vers le lointain, et l'autre, plus âgée, se tient derrière elle, les mains posées sur ses épaules regardant vers le bas, là aussi avec une intensité particulièrement bien immortalisé. La bonne émotion, captée au bon moment. Sauf que Boris Eldagsen n'a rien capté du tout.

Il l'a révélé lui-même, cette photo n'est pas une photo, c'est une image créée par une intelligence artificielle. Ces deux femmes n'existent pas. Cette scène n'existe pas. Sauf que les membres du jury ne l'ont pas remarqué. "En fait, explique-t-il sur son blog, j'ai voulu faire un test, pour voir si le monde de la photographie était prêt à gérer l’intrusion de l'IA dans les concours internationaux, et visiblement ce n'est pas le cas." Boris Eldagsen a donc annoncé qu'il refusait le prix, le jury a retiré son œuvre de son site. Mais le malaise est là.

Des progrès techniques fulgurants en six mois

En six mois, les progrès des intelligences artificielles spécialisées dans la fabrication d’images ont été fulgurants, exponentiels. Au mois de septembre, on pouvait dire qu’une photo avait été créée par une IA parce que les logiciels ne maitrisaient pas bien certains détails, par exemple, les mains, les phalanges, les ongles, mal détourés. Aujourd’hui, ces mêmes logiciels ont appris, corrigé leurs lacunes et progressé au point que plus personne ne peut faire la différence entre la représentation d’une main inventée par une machine, et une photo prise par un humain. Plus personne, sauf un ordinateur.

Et c’est là que ça devient vertigineux : désormais seule une intelligence artificielle peut dire si une photo a été produite par un humain ou par un ordinateur. D’où l’importance du message de Boris Eldagsen sur l’urgence de s’interroger sur ce qui est en train de se passer, pas simplement de constater les progrès de la technologie mais de se poser des questions. Que veut-on faire de ces intelligences artificielles ? Que voulons-nous voir ? Que voulons-nous montrer ? Ça concerne les institutions, les gouvernements, les médias, le monde de l’éducation, clairement bien plus que le petit comité d’un prix de photographie.

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