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Dans l'Allemagne nazie, le frère de Göring sauvait des juifs

Pilier du IIIème Reich, Hermann Göring poursuivait les juifs. Son frère, Albert, lui, faisait tout le contraire : il essayait de les sauver. Son action commence à être reconnue.
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Cette révélation paraît
incroyable quand on connaît l'histoire d'Hermann Göring, le grand frère
d'Albert. Hermann Göring était proche d'Hitler. Il dirigeait la Luftwaffe. Il a
joué un rôle important dans la Shoah. Après la guerre, il s'est suicidé pour éviter
la pendaison. Pendant toutes ces années noires, Albert, lui, luttait contre le
nazisme. A Jérusalem, le mémorial de Yad Vashem étudie en ce moment son
dossier. Albert Göring pourrait être distingué comme un "Juste parmi les
nations", comme un de ceux qui ont risqué leur vie pour sauver des juifs.

Dans Le Figaro,
Patrick Saint-Paul fait le portrait de cet homme peu connu. Quand Hitler arrive
au pouvoir, Albert Göring quitte l'Allemagne et s'installe à Vienne. Dès qu'il
le peut, il s'oppose aux nazis. En 1938, par exemple, lorsque l'Autriche est
annexée, des SS attaquent les commerces qui appartiennent à des juifs. Dans une
boutique, à Vienne, ils font poser, en vitrine, la mère du propriétaire qui a
75 ans ; ils lui mettent une pancarte autour du cou : "je suis une sale
juive". Albert s'interpose. Il sauve la femme persécutée. Plus tard, quand
les SS demandent aux juifs de nettoyer des ruelles de Vienne avec des brosses à
dents, Albert se met à genoux, lui aussi, avec une brosse. Les nazis n'osent
pas l'arrêter. Ils ne veulent pas provoquer la colère de son frère, Hermann.

Albert va plus loin encore.
Dans Le Figaro, Patrick Saint-Paul raconte qu'il intervient parfois carrément
dans les camps de concentration. En Tchécoslovaquie, il est un des dirigeants
de l'usine Skoda, une société d'armement. Un jour, il débarque avec huit
camions dans le camp de Theresienstadt et il réquisitionne des déportés juifs,
officiellement pour faire tourner l'usine. Mais dès qu'il a mis les déportés à
l'abri du danger, il les libère. Un jour, il imite le papier à en-tête
d'Hermann Göring pour faire libérer des prisonniers du camp de Dachau. Pour que
ça passe, il signe simplement "Göring".

Pendant
toute la guerre, les deux frères ont d'étranges relations. Hermann Göring
considère Albert comme le mouton noir de la famille. Mais en même temps, il le
couvre. Plusieurs fois, il l'empêche d'être arrêté. A la fin de la guerre,
Albert Göring est quand même emprisonné. Les Américains ont beaucoup de mal à
croire qu'un Göring a pu sauver des juifs. Albert est finalement libéré en
1947, grâce à des témoignages de ses employés. Il termine sa vie à Münich. Mais
dans Le Figaro, Patrick Saint-Paul explique que c'est un désastre : le frère
cadet du dirigeant nazi ne parvient pas à retrouver un emploi. Il sombre dans
la misère, dans l'alcoolisme. Sa femme le quitte. Albert Goering meurt en 1966,
dans l'oubli. Il pourrait enfin être réhabilité.

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