Le mystère du "vrai-faux" pétrole lorrain
Prenez deux grandes villes, Nancy et Metz. Imaginez maintenant qu'elles ressemblent au Koweit ou au Qatar. Depuis le 16 septembre 2011, c'est la promesse d'Elixir Petroleum : faire jaillir un trésor sous les pieds des Lorrains. Ce jour là, la petite compagnie australienne annonce qu'elle a découvert, dans l'est de la France, d'énormes réserves d'hydrocarbures, de quoi fournir 165 milliards de barils de pétrole et 18.000 milliards de mètres cubes de gaz. Dans Les Echos ce matin, Claude Barjonet raconte le mystère de ce "vrai-faux" pétrole lorrain - vrai et faux car, pour l'instant, aucun forage n'a eu lieu. Pourtant, au début, Elixir Petroleum est très sûr d'elle. A la bourse de Sidney, la petite société voit son action augmenter de 60%. Elle parvient à lever des fonds. Puis elle affirme qu'elle a identifié quarante projets de forage dans le sous-sol de Lorraine. Pour exploiter les hydrocarbures, il faut de gros moyens : chaque forage coûte entre 3 millions et 10 millions d'euros. Mais quand le journal Les Echos contacte Elixir Petroleum pour obtenir des précisions, il n'obtient aucune réponse. Et aucun puits de pétrole n'apparaît à l'horizon. Ce projet est-il absurde ? A priori, non. En Lorraine, on a déjà exploité des hydrocarbures : entre 1983 et 1998, du pétrole a jailli à Forcelles-Saint-Gorgon, au sud de Nancy. Dans la région, on a également produit du gaz. Pas très loin, en Ile de France et en Champagne, environ 500.000 tonnes de brut sont exploitées chaque année - l'équivalent de trois jours de consommation dans notre pays. Ca n'est pas rien. Mais entre ces réalisations et les projets d'Elixir Petroleum, il y a un à franchir. D'abord parce que les spécialistes ne savent pas précisément où creuser. La société australienne a obtenu une licence d'exploration sur 5.000 kilomètres carrés. La zone est vaste. Avant de trouver du pétrole, il faudrait investir massivement dans les recherches, sans aucune garantie. Dans Les Echos, Claude Barjonet rappelle aussi l'affaire du gaz de schiste. En France, la technique de fracturation hydraulique est interdite. Le code minier va être revu. Personne ne sait quelles techniques seront autorisées, ou pas, dans cinq ou dans dix ans. Pour toutes ces raisons, les investisseurs hésitent à s'engager. Les experts, eux, ont des doutes. Nancy n'est pas encore Koweit City.
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