"Nuit de la solidarité" : "Ce n'est pas une opération de communication", assure Bruno Julliard, premier adjoint de Paris
Bruno Julliard, premier adjoint à la mairie de Paris, était l'invité de "L'Interview J-1" jeudi 15 février, à quelques heures de la "Nuit de la solidarité".
L'invité de L'Interview J-1, jeudi 15 février, était Bruno Julliard, premier adjoint à la mairie de Paris. Cette nuit, pendant deux heures, avec Anne Hidalgo, 1 700 bénévoles et 300 professionnels issus d'associations du secteur social, il va sillonner les rues de Paris et mener un recensement inédit sur les personnes qui dorment à la rue. L'opération a été baptisée "La Nuit de la solidarité".
franceinfo : Quel est l'objectif de cette maraude géante dans les rues de la capitale ?
Bruno Julliard : [C'est] essayer, à la fin de la nuit, d'avoir une photographie la plus précise précise du nombre de personnes qui vont dormir à la rue ce soir, mais aussi une photographie qualitative des raisons pour lesquelles nous avons probablement plusieurs milliers de personnes qui dorment à la rue.
Comment allez-vous procéder ?
Nous allons nous inspirer d'une pratique qui est née à New York avec Mickaël Bloomberg, l'ancien maire, qui était dans la même situation que nous : il avait fait de la lutte contre la grande précarité une priorité de son mandat. Pour pouvoir être efficace avec l'État, avec le secteur associatif, donc les professionnels du secteur social, (...) avec nos partenaires, il faut une meilleure connaissance du dispositif, et notamment du nombre de personnes et des raisons pour lesquelles ces personnes sont à la rue. On veut une démarche sérieuse, scientifique. Cela a demandé des mois de travail, de formation (...) Il y aura plus de 300 équipes : un professionnel accompagnera chaque équipe et un questionnaire sera rempli par chaque bénévole.
Cette opération se déroule sur fond de polémique entre le gouvernement et les associations. Julien Denormandie, le secrétaire d'État à la Cohésion des territoires, a déclaré le 29 janvier sur France Inter qu'"une cinquantaine d'hommes isolés en Île-de-France" dormaient dans la rue. La déclaration a choqué les associations... C'est une erreur de communication, une maladresse de la part du gouvernement ?
Oui, d'ailleurs Julien Denormandie a rectifié depuis cette erreur. Il s'agissait, si j'ai bien compris, du nombre d'hommes seuls qui ont appelé le 115 dans une nuit. En réalité, le nombre de personnes qui dorment à la rue à Paris est nettement supérieur (...) Nous avons fait une expérimentation dans le 10e arrondissement il y a quelques semaines (...) et il y a eu plus de 400 personnes à la rue (...) Je précise simplement que, du côté de l'État et notamment de Julien Denormandie mais de tout le gouvernement, s'il y avait, pendant un temps, un peu de craintes ou de doutes sur les raisons pour lesquelles nous menions cette opération, ces doutes ont été levés. Et nous voyons bien, à travers ces polémiques, que nous avons tous - quelque soient nos positions, qu'il s'agisse du gouvernement, de la prefecture, de la mairie de Paris ou des associations - ce besoin d'avoir une bonne photographie de la situation réélle.
La circulaire Collomb, critiquée par les associations, est examinée vendredi par le Conseil d'État. Demandez-vous toujours son retrait ?
Oui absolument, parce qu'une de ses conséquences, c'est ce que nous appeleons les "dublinés" [mot issu du règlement Dublin qui oblige les migrants à déposer leur dossier dans le premier pays européen où ils sont entrés]. Aujourd'hui, lorsque les services sociaux tombent sur ces "dublinés", la règle veut qu'on les renvoie dans leur pays d'arrivée, c'est-à-dire l'Espagne, l'Italie ou la Grèce. Ce n'est tout simplement pas possible mais, surtout, cela se traduit par le fait que des migrants sur le territoire parisien fuient les centres d'accueil, de peur de tomber sur des forces de l'ordre (...) Si on veut vraiment améliorer la situation, et c'est notre seule volonté - ce n'est pas une opération de communication ni une opération de mise en accusation de l'État - [il faut] trouver un moyen, créer un outil, pour une plus fine connaissance et enfin apporter des réponses ensemble plus performantes, plus efficaces qu'aujourd'hui.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.