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L’avocat Christophe Eck (Gide) : "En Iran, nous conseillons aux entreprises étrangères d’attendre"

Christophe Eck, associé du cabinet Gide, était l'invité de "L'interview éco" mercredi sur franceinfo.

Article rédigé par franceinfo, Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Christophe Eck, associé du cabinet Gide, le 9 mai 2018 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Après le retrait américain de l'accord international sur le nucléaire iranien signé en 2015, de nombreux entrepreneurs français qui se sont installés en Iran sont aujourd'hui "très déçus, résignés, se sentant un peu floués par rapport à l'accord", a expliqué mercredi sur franceinfo Christophe Eck, avocat associé du cabinet Gide, qui aide les sociétés à s'installer dans le pays. "On leur dit pour l'instant d'attendre", notamment la position européenne et de ce que pourrait faire l'Union Européenne "en terme de protection des investissements des ressortissants européens", a-t-il réagi.

franceinfo : Cet accord de 2015 a entrainé des entreprises françaises à s’installer en Iran. Que leur dites-vous aujourd’hui ?

Christophe Eck : On leur dit pour l’instant d’attendre parce qu’effectivement, il y a eu des annonces américaines par le président Trump, par M. Bolton et par l’administration qui ne sont pas toutes cohérentes. Mais j’ai senti des entrepreneurs très déçus, résignés, se sentant un peu floués par rapport à l’accord de 2015. Donc il faut attendre le détail de ce que les Américains vont faire, et surtout attendre la position européenne et ce que pourrait faire l’Union Européenne en terme de protection des investissements des ressortissants européens. Je pense qu’aujourd’hui il faut attendre, se préparer éventuellement à sortir mais ne pas se précipiter. Il y a dans les accords américains deux tranches de trois mois ou six mois pour tenir compte de ces sanctions et cesser toute affaire avec l’Iran. Cela laisse le temps de se poser, d’analyser les conséquences de cette décision, et de voir si oui ou non ils peuvent rester, ajuster leurs investissements. Si les États-Unis allaient au bout de leur logique, les entreprises risquent des sanctions américaines : ça peut être des amendes potentiellement énormes, des mesures de représailles aux États-Unis, le bannissement du marché américain… Toute la panoplie des sanctions que les Américains peuvent mettre en place. Des mesures un peu douloureuses. Nous, on se pose la question de maintenir ou non notre bureau à Téhéran. On va faire l’analyse de l’argumentation américaine qui n’est pas très claire sur le sujet.

La France a exporté en Iran pour 1,5 milliards d'euros l’an dernier, c’est trois fois plus qu’en 2015. Quels sont les secteurs les plus exposés aujourd’hui en Iran ?

C’est multisectoriel. On a vu un intérêt de sociétés très diverses, des très petites, moyennes, des multinationales, que ça soit dans l’énergie, la santé, l’informatique, l’industrie… Tous les secteurs dans lesquels les sociétés françaises sont fortes se sont manifestés. Beaucoup en 2016, mais de moins en moins aujourd’hui. Ce qui a freiné les investisseurs, c’est bien sûr cette menace de sortie, et puis la certification tous les trois mois de l’accord par les Américains, donc ça génère une incertitude que n’aime pas l’investisseur. On a vu au fil de l’eau, non pas l'intérêt baisser, mais un attentisme naitre.  

Qu’est-ce qui intéresse malgré tout des entreprises françaises et européennes en Iran ?

C’est un marché unique dans la région. Une population de 80 millions d’habitants, une population jeune, très bien éduquée, énormément de scientifiques, d’ingénieurs… Beaucoup de commerçants, d’industriels, donc c’est un pays très dynamique qui a tous les atouts pour l’investissement. L'enjeu pour l’Iran, ça sera de voir si l’Union Européenne résiste aux pressions américaines et au retrait américain. Les sociétés doivent se tourner vers leurs dirigeants pour voir si l’Europe souveraine arrive à mettre en place un système qui protège les investissements européens. Après, si ça n’est pas le cas, les Iraniens se tourneront vers d’autres pays comme l’Asie, l’Europe de l’Est, qui sont moins sensibles aux sanctions américaines. C’est un enjeu géopolitique fort, pour les entreprises des deux côtés. À court terme, si rien n’est fait pour bloquer les Américains, l’économie iranienne va souffrir. 

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