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Leonarda : comment cette séquence s'est emballée ?

Mais que s'est-il donc passé dans l'affaire Leonarda ? Comment François Hollande, en 7 mn de télévision samedi, a réussi à se mettre tout le monde à dos ? Retour sur une indécision présidentielle.
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Franceinfo (Franceinfo)

Il a voulu montrer qui était
le patron au sommet de l'Etat. Et son intervention télévisée, annoncée à la
va-vite, était censée éteindre, d'un souffle, l'incendie kosovar qui courait
depuis cinq jours. Tous les regards étaient tournés vers le président avec une
question et une seule : allait-il ne pas céder à l'émotion et respecter le
droit qui n'a pas été bafoué, ou allait-il satisfaire son aile gauche et
humilier son populaire ministre de l'intérieur ? En choisissant le retour
de Leonarda, elle seule et pas les autres membres de sa famille, François
Hollande a rejoué le jugement de Salomon. Et relancé la polémique de plus
belle, en fabriquant non pas une moitié de mécontents, mais deux.

Pourquoi le président a-t-il pris un tel risque ?

La question s'est posée à
l'Elysée, raconte un proche du président,  de laisser monter Jean-Marc Ayrault en
première ligne. Ce qui n'aurait pas abaissé la pression. François Hollande en
était convaincu et a décidé de faire le job seul pour éteindre la menace, bien
réelle selon l'entourage présidentiel, d'un dérapage lycéen dans la rue. Les étudiants
s'apprêtaient à entrer dans la danse avec pour mot d'ordre : elle doit
rentrer. François Hollande les a court-circuités en annonçant : elle
rentre, si elle veut. Exit les manifs de jeunes, au prix d'une indécision qui
allait forcément décevoir. L'objet de la contestation a changé de nature.

Les critiques les plus violentes sont venues des rangs
de la majorité.

C'est bien là le problème.
L'affaiblissement du président de la République est tel qu'il a gagné les
esprits à gauche. Il est incroyable de voir les Verts, avec lesquels le PS
négocie pour les municipales, dénoncer hier, dans un communiqué rageur, les propos
"inhumains et incompréhensibles" de François Hollande et de Manuel Valls.
Nous aimerions bien savoir ce qu'en Cécile Duflot membre du gouvernement. Mais
comme à chaque fois, cette interrogation restera lettre morte. Combien de
personnalités socialistes se sont lâchées, jusqu'au premier secrétaire Harlem
Désir, qui a réclamé le retour de la famille, oubliant son devoir de
solidarité ? Et au bout de la chaîne, cela donne Samia Ghali, la candidate
battue à la primaire marseillaise, qui a fait siffler hier soir les noms du
président et de son Premier ministre. François Hollande n'est aujourd'hui plus
respecté par toute une partie de la gauche, qu'il cherche à ménager en vain.

Comment qualifier cette séquence qui s'est
emballée ?

Tout le monde pète un câble.
"Nous avons eu les années folles, voici venir les années dingues ",
a commenté hier Jean-Christophe Cambadélis, qui a lancé aux socialistes un
appel au calme. Il faut tout de même rappeler qu'en France, il y a un consensus
national au sujet de l'immigration, aucun parti ne réclame l'ouverture des
frontières, ni même la régularisation massive de tout le monde. L'émotion s'est
emparée de cette affaire, donnant lieu à un emballement médiatique général,
avec une enfant de quinze ans répondant depuis le Kosovo, dans la seconde, à
une déclaration du président de la cinquième puissance économique mondiale.
Nous avons vécu un moment de télévision sans précédent qui n'a fait qu'ajouter à
la désacralisation du chef de l'Etat, critiqué par ses détracteurs pour une
incapacité chronique à faire des choix tranchés. Un proche soutien de François
Hollande soupirait hier soir : "Dire que s'ils avaient interpellé la
jeune fille après la sortie scolaire, personne n'aurait jamais parlé de cette
histoire".

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