Les Français et le dégoût de la politique
François Hollande n'avait pas vraiment besoin de ce
nouveau feuilleton susceptible de le faire dégringoler un peu plus dans les
sondages. Et les images en boucle à la télévision des lycéens qui défilent aux
cris de "Valls, démission " ne sont guère rassurantes. Les vacances
tombent à point nommé pour faire redescendre un peu tout le monde. Il
n'empêche : il va bien falloir trouver une porte de sortie en attendant les
résultats de l'enquête administrative sur les conditions de l'expulsion de la
jeune Leonarda. Le dilemme est cornélien pour le chef de l'Etat : la
laisser au Kosovo reviendrait à dynamiter la majorité. La faire rentrer serait
désavouer sa police et son populaire ministre de l'intérieur, le pousser à une
impossible démission.
Et que fait le
président ?
Il se tait. Pas de commentaire depuis l'Elysée. De
personne. Et ce silence érigé en méthode de gestion de crise intrigue, irrite.
Ce qui prouve une fois de plus que la promesse d'une présidence dite normale a
vécu. Les Français, qui s'étaient lassés de Nicolas Sarkozy, un président qui
gouvernait à l'impulsion et se mêlait de tout, ne supportent pas plus l'apparente
passivité, du moins l'attentisme de son successeur. Et l'entourage de François
Hollande fait aujourd'hui le constat d'un rejet de la politique, que cette
affaire ne va évidemment pas arranger.
Comment est-ce qu'il se
manifeste ?
Tout
d'abord au travers des récits des élus locaux qui défilent à déjeuner à
l'Elysée. "Dites au gouvernement surtout de ne plus bouger à partir du
premier janvier ", préviennent les
candidats aux municipales, inquiets de la tournure que prend la campagne qui a
déjà commencé. Les élus en question sont à cran, et les ministres ne
sont pas les bienvenus sur le terrain, à l'exception notable de Manuel Valls,
aujourd'hui dans la tourmente. Certaines déclarations anti FN ensuite ont eu un
effet désastreux. Le "Brignoles, ce n'est pas la France" de
Jean-Marc Ayrault a été jugé contre-productif à l'Elysée.
Il y a également l'instabilité des partis politiques, sauf un.
Les
électeurs ne supportent plus le spectacle de la division qu'offrent tous les
partis, toutes les familles du Front de gauche à l'UMP. Il n'y a que le Front
National qui se montre stable et avance d'un bloc, constate un proche du
président, qui y voit l'explication en partie du succès de Marine le Pen. L'affaire
Leonarda, quelle qu'en soit l'issue, va conforter le vote FN, et l'exécutif reste
désarmé face à ce phénomène inéluctable. Le feuilleton qui se déroule sous nos
yeux, attisé par les médias que nous sommes, dessine une France qui ne
s'aimerait plus et ne se comprendrait plus. Les transgressions dans le discours
politique ne font qu'ajouter à la sensation de chaos ambiant. La République
coule et nous regardons ailleurs. Les réponses attendues dépassent largement le
dossier sensible, complexe, de l'expulsion de la jeune Kosovare.
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