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L'USM et l'erreur de la Chancellerie : un problème "connu", "politiquement explosif"

Après les révélations du Canard Enchaîné mercredi sur une erreur de la Chancellerie datant de 2004 et qui pourrait conduire à la libération de centaines de détenus, le président de l'Union Syndicale des Magistrats  Christophe Regnard met en cause les gouvernements qui ont mis du temps à réagir à un problème visiblement connu.
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
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Christophe Regnard s'étonne : comment les juristes entourant le ministre de la Justice Dominique Perben en 2004 ont-ils pu le laisser prendre une telle décision alors qu'ils savaient que la question de la prescription des peines ne pouvaient dépendre que d'une loi et non d'un décret ?

D'après les informations du Canard Enchaîné paru ce mercredi, l'ex-ministre de la Justice a promulgué en 2004 un décret sur les conditions de prescription des peines. Ce décret indique que les prescriptions peuvent être interrompues par les "actes ou décisions du ministère public " ou par ceux "du juge de l'application des peines ". Or la Cour de cassation vient de considérer que ces conditions ne pouvaient être fixées que par une loi.

"Ces choses auraient dû être anticipées. Quand on prend ce genre de décret, il faut même un avis du conseil d'Etat composé d'éminent juristes , explique le président de l'Union Syndicale de la Magistrature (USM). C'est le cœur même du travail des juristes de connaître ces distinctions entre la loi et le decret. C'est une erreur majeure avec des conséquences importantes. "

3.500 dossiers à vérifier

La conséquence dont parle le magistrat, c'est évidemment la réclusion de personnes qui ne devraient pas être derrière les barreaux. Dans un communiqué publié mardi soir, le ministère de la Justice a confirmé avoir demandé "la vérification des condamnations susceptibles d'entrer dans le champ de cette jurisprudence restrictive sur la base d'une estimation (...) qui s'élèverait à 3.499 pour l'ensemble des ressorts " des cours d'appel.

D'après la Chancellerie, il semble que sur les 700 premiers dossiers examinés, seules quatre personnes sont concernées. "On est loin des annonces du Canard Enchainé , constate le président de l'USM. Mais c'est déjà trop parce que ces personnes sont en détention depuis un certain temps alors qu'elles ne devraient pas s'y trouver."

Un problème connu de longue date

Pour Christophe Regnard, l'erreur était connue depuis longtemps puisque en mars 2012, le gouvernement de François Fillon aurait tenté d'y remédier par une loi. Mais le magistrat s'étonne : pourquoi à l'époque aucune mesure n'a été prise pour obtenir la libération des personnes injustement incarcérées ? "C'était en mars 2012, à deux mois des présidentielles, ceci explique peut-être cela , pense-t-il. La responsabilité politique est manifestement engagée dans cette histoire. "

"La situation est connue de longue date, mais les gouvernements successifs n'ont pas voulu se pencher dessus. Politiquement, c'est explosif."

La question de la surpopulation carcérale

Enfin, le magistrat refuse tout rapprochement entre l'affaire de Chartres et celle révélée aujourd'hui par le Canard Enchainé  : "Ce sont deux histoires qui n'ont rien à voir et qui ni dans un cas ni dans l'autre ne mettent en cause la justice et les magistrats ".

Quand à la question de la surpopulation carcérale soulevée par l'affaire de Chartes - trois personnes avaient été laissées en liberté faute de place en cellules - Christophe Regnard ne croit pas que la création de places de prison supplémentaires soit la solution. "Cela  coûterait cher et abosrderait la quasi-totalité du budget de la justice ". La solution à ce problème passe peut-être par "un équilibre entre milieu carcéral fermé et ouvert ", en augmentant par exemple le nombre de conseillers d'insertion et de bracelets électroniques.

Le magistrat déplore le retard de la France dans ce domaine par rapport à ses voisins, notamment ceux du Nord de l'Europe. "Depuis des années, c'est un débat récurrent et sans solution , regrette Christophe Regnard. C'est désolant parce que dans le même temps ce sont la délinquance et la récidive qui vont augmenter. "

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