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On a enfin réussi à enregistrer les ondes cérébrales des pieuvres

À quoi pensent les pieuvres ? La question fascine depuis longtemps les neuroscientifiques : cette espèce est à la fois si intelligente et si différente. Pour la première fois, on a réussi à insérer des électrodes dans un individu. Et l’enregistrement de 12 heures montre que oui, cette espèce développe vraiment un autre genre de cognition.
Article rédigé par franceinfo - Hervé Poirier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Rencontre du troisième type, avec une intelligence extra-terrestre, celle de la pieuvre... (Illustration) (SINDHU M / 500PX / GETTY IMAGES)

Le billet sciences du weekend avec Hervé Poirier, rédacteur en chef au magazine Epsiloon, se penche sur une information réjouissante. On a réussi à enregistrer les ondes cérébrales d'une pieuvre

franceinfo : Alors, cette nouvelle, c’est à la fois une sacrée performance, et une sacrée promesse. Expliquez-nous.

Hervé Poirier : Cet enregistrement nous fait entrer pour la première fois dans le cerveau le plus fascinant de la planète – en dehors du nôtre peut-être. Car une pieuvre peut nouer des interactions sociales complexes, organiser des cités sous-marines, décorer d’anémones de mer l’entrée de son antre, se dissimuler dans des coquilles de noix, ouvrir un bocal.

Elle est même capable d’apprendre à manipuler un outil, simplement en regardant un tutoriel vidéo destiné aux humains, nous a confié une chercheuse, éberluée. Et tout cela avec 150 fois moins de neurones que nous, répartis en neuf cerveaux, un central, et un, pour chaque bras. Or, oui, pour la première fois, on a réussi à enregistrer le fonctionnement de ce fantasmatique organe !

Pourquoi on n’y arrivait pas jusqu’ici ?

Pour une raison toute bête : la pieuvre ne possède aucune structure dure externe, sur laquelle ancrer un équipement. Et de toute façon, elle retire systématiquement tout ce qui est attaché à son corps avec ses bras très agiles. Mais une équipe internationale de biologistes a trouvé la parade.

Ils ont anesthésié trois spécimens qui vivent en captivité, leur ont implanté sous la peau un enregistreur d’électroencéphalogrammes, dédié à l’origine aux oiseaux migrateurs, ils l’ont collé à la paroi musculaire qui entoure le cerveau, et ont plongé les électrodes dans un des lobes, qu’ils pensent dédiés à l’apprentissage et à la mémoire.

De quoi enregistrer pendant 12 heures, l’activité neuronale d’une pieuvre, synchronisée avec une vidéo HD de son comportement. Une grande première !

Et alors ? À quoi pense la pieuvre ?

Eh bien, comme le reconnaissent les chercheurs, c’est un peu tôt pour le dire… Le dispositif fonctionne, des dynamiques d’activités neuronales classiques ont été identifiées, mais les chercheurs n’ont pas pu relier ces activités cérébrales à des comportements ou des tâches spécifiques – c’est ce qu’ils veulent maintenant faire.

Ils ont quand même détecté un très étrange signal, des oscillations lentes, amples, et de très longue durée, qui n’avaient jamais été décrites auparavant dans aucun cerveau. Une pensée typique de pieuvre ? À voir. L’exploration ne fait que commencer. Comme une rencontre du troisième type, avec une intelligence extra-terrestre.

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