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"On joue sur le factuel, avec des sources fiables" : les pro-vaccins investissent les réseaux pour contrer les arguments des "anti-vax"

Alors que la vaccination est ouverte à tous à partir du 31 mai, des citoyens se mobilisent pour contrer la diffusion de fausses informations sur les réseaux sociaux.

Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le vaccin AstraZeneca sur le comptoir d'une pharmacie le 12 mars 2021. (MARTIN BUREAU / AFP)

"Les vaccins contre le Covid-19 peuvent rendre stérile, provoquent des AVC: depuis le début de la pandémie de Covid-19, ce bruit de fond s'amplifie et les rumeurs sur les dangers des vaccins mettent à mal la lutte contre la pandémie. Ces affirmations sans fondement scientifique se propagent à la vitesse de la lumière et font douter, inquiètent, ces trentenaires qui peuvent se faire vacciner dès aujourd'hui mais hésitent. Ils s'expriment souvent en ces termes : "J'attends de voir quel effet ça fait sur les gens, ce vaccin...", "Les composants du vaccin font peur. Moi, ma santé d'abord..."

>> DIRECT. Covid-19 : la vaccination est désormais ouverte à tous les adultes

C'est à eux que s'adressent sur les réseaux sociaux des collectifs et des associations pro-vaccins, comme "Vaccins France - Information et Discussions", "Stop à la propagande anti-vaccins" ou "Covid-19 Fédération", et ils connaissent un regain d'activité avec la pandémie. Ou encore "Les Vaxxeuses", collectif d'une quinzaine de personnes formé en 2017 au moment de la proposition de loi sur les onze vaccins obligatoires. Il compte 28 000 abonnés sur Facebook, dont 10 000 l'ont rejoint ces six derniers mois, et est présent aussi sur Twitter et Instagram.

L'humour, l'ironie et le factuel pour convaincre

Plusieurs heures par jours, ses membres parcourent les réseaux sociaux à la recherche de ce qu'ils appellent des "perles" des anti-vaccins qu'ils tournent en ridicule comme la puce 5G qui serait ajoutée au vaccin. Les membres du collectif restent anonymes, à cause des menaces de mort. "Certains d'entre nous sont infiltrés sur des groupes anti-vaccins, sur des groupes de médecine alternative et autres pseudoscience, détaille Marie*. On procède de plusieurs façons : d'une part, par l'humour et l'ironie qui sont quand même la marque de fabrique de la page. D'autres vont plutôt rapporter des articles de presse, ou écrire des articles." "Le mouvement anti-vaccin joue beaucoup sur l'émotionnel, sur les anecdotes personnelles, etc., poursuit Marie. Nous, on joue sur le factuel, avec des sources fiables."

C'est gratifiant de se dire qu'à notre échelle, si minime soit-elle, on peut faire avancer les choses en arrivant à convaincre quelqu'un qui était sceptique.

Marie

à franceinfo

D'autres sont sur le front de l'épidémie dans leurs cabinets, à l'hôpital mais aussi en ligne. Depuis mars 2018, les 200 médecins du collectif "Fakemed" se battent contre la désinformation médicale. Le collectif compte 18 000 abonnés sur Twitter, où ses membres postent des liens vers des articles sourcés et vulgarisateurs.

Les réseaux sociaux saturés de fausses informations

"Vous avez des gens qui saturent de fausses informations les réseaux sociaux, explique le Dr Cyril Vidal, président de Fakemed. Certaines sont émises par des professionnels de santé eux-mêmes, c'est à dire des personnes qui utilisent leur titre et qui ont une certaine crédibilité du fait d'être par exemple docteur en médecine. Ces personnes qui diffusent volontairement ou inconsciemment des mauvaises informations de santé nous ont rendu la tâche plus difficile."

Le combat numérique contre le flot de contenus des militants anti-vaccins est inégal, notamment car les algorithmes des réseaux sociaux les desservent, selon lui.

Il y a quelques jours, la Commission européenne a demandé aux géants du numérique de redoubler d'efforts pour lutter contre la désinformation. Bruxelles veut renforcer le code de bonnes pratiques contre les fake news, signé en 2018 par plusieurs plateformes dont Twitter, Facebook, Google, car avec la pandémie, ledit code a montré ses limites. "Il faut qu'ils prennent conscience de leur rôle, de leur poids, de l'influence de ces fameux algorithmes et de leurs recommandations, insiste Sylvain Delouvée, maître de conférence en psychologie sociale à l'université Rennes II spécialiste des croyances collectives. Aujourd'hui, Twitter commence timidement à le faire avec ses petites options où lorsque vous voulez retweeter un tweet sans avoir lu l'article, on vous le signale."

Je crois qu'il faut qu'ils soient plus offensifs. Ils ont, à mon avis, laissé trop facilement et pendant trop longtemps la parole à des semeurs de doute et parfois à des gens qui mentent de manière éhontée. Et ces mensonges ont des conséquences.

Sylvain Delouvée

à franceinfo

Bruxelles appelle à davantage de transparence sur les algorithmes utilisés par les géants du net pour mettre en avant des contenus, et demande que les utilisateurs aient à disposition des outils pour signaler plus facilement des informations fausses ou trompeuses.

* Le prénom a été modifié

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