Périphérique parisien à 50 km/h : pour les riverains qui "vivent avec", l'espoir d'une diminution des nuisances
La circulation automobile sur le boulevard périphérique, qui fait le tour de la capitale, était depuis dix ans limitée à 70 km/h. Elle l'est désormais à 50 km/h, pour réduire les nuisances sonores et la pollution de l'air.
Plus d'un demi-million de personnes vivent près du périphérique de 35 kilomètres, où passent quotidiennement plus d'un million de véhicules. Parmi eux, Mourad qui vit depuis 25 ans au Pré-Saint-Gervais, à l'est de Paris. Au 17e et dernier étage d'une grande tour, il a vue sur la capitale mais surtout sur le périphérique, à moins de 100 mètres de son immeuble.
"J'ai une grande fenêtre. Des fois, j'aimerais bien ouvrir, mais il y a tellement de bruit, explique Mourad. Pour la pollution, il y a de la poussière partout chez moi. Est-ce qu’il y a une solution ? Ils ont diminué de 90 à 80, de 80 à 70, là à 50. Il n’y a pas de solution ! Tellement il y a des milliers de voitures qui passent par là, le périph' est avec nous, on vit avec, on n'a pas le choix, on s'adapte".
Plus au sud, près de la Porte Dorée, Alexandre habite depuis quarante dans un petit immeuble à une cinquantaine de mètres du périphérique. Dans les années 1990, avec son association de riverains, il a contribué à faire bâtir un mur antibruit qui n'est pas toujours efficace, surtout quand la météo est capricieuse. "Il y a des jours où le vent tournant va porter le bruit dans le voisinage et effectivement, c'est très bruyant. On ne peut pas dire que c'est une constante", constate-t-il.
Beaucoup de sans-abri et de réfugiés
En tout, un peu moins de la moitié du périphérique est encadré par des murs antibruit. À deux maisons de là, Fidèline habite dans un pavillon art déco, à la frontière entre Paris et Saint-Mandé. Quand elle emménage ici avec son mari et ses trois enfants en 2019, certains de ses proches sont étonnés par ce choix. Elle est attirée par la proximité du bois de Vincennes malgré la pollution du périphérique. "Moi je fais pas mal de course à pied mais on a des enfants petits, on est dans une zone plus exposée qu'ailleurs, ça fait un peu peur. On se dit que ce n’est pas un cadeau à leur faire pour l'avenir". Une pollution que les pouvoirs publics espèrent voir diminuer en même temps que la vitesse autorisée sur le périphérique.
Autour de ce périphérique, il y a aussi celles et ceux qui ne rentrent pas dans les statistiques, mais qui vivent aussi sur le périphérique. À la porte de la Villette, plusieurs tentes sont alignées sur le trottoir, sous les lumières blafardes. Slocki attend le petit déjeuner de la maraude de l'Armée du Salut. Il vient du Nigéria, il est en France depuis dix ans. "Parfois je dors sous le pont, parfois je dors ici. Ce n'est pas facile. Le bruit, c'est trop".
Juste à côté, Andri prend son café. Lui vient d'Indonésie, cela fait plus de vingt ans qu'il vit en France, et qu'il vit sous ce tunnel. "En fait, ça va, sauf quand des gens viennent au milieu de la nuit pour tenter de voler, dit-il. Moi je ne viens ici que la nuit pour dormir. À ce moment-là, il n'y a pas tant de voitures, le bruit n'est pas si fort". Sous le périphérique, mais aussi dessus, à côté, on trouve beaucoup de sans-abri, des personnes réfugiées, parfois des toxicomanes. Tous se retrouvent là car malgré le bruit et la pollution, ils sont isolés, plus difficiles à trouver pour les autorités alors que dans le centre de Paris, ils peuvent être chassés.
Patrimoine de la capitale
Ce périphérique souvent mal-aimé a plusieurs fois été aménagé depuis les années 2000. À certains endroits, on essaie de l'embellir, de le camoufler, avec des jardins partagés, des bassins, des jeux pour enfants, par exemple. À certains moments, on ne se rend pas compte qu'on passe d'un côté à l'autre du périphérique. Clément Blanchet, architecte et urbaniste, a contribué à un ouvrage collectif sur le périphérique. Pour lui, comme la tour Montparnasse, il fait partie malgré tout du patrimoine de la capitale. "Je pense qu'il ne faut pas l'effacer. Déjà c'est une mémoire collective, qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, il y a des travailleurs, des gens, des familles, nous-mêmes, on a vécu des émotions sur ce périphérique", détaille-t-il.
"En fait, on doit garder une certaine identité. La voiture doit s'excuser, comme je dis souvent dans mes projets urbains ou architecturaux, ajoute Clément Blanchet. Si on change les caractéristiques de transport, si la voiture change, qu'on va vers l'électrique, qu'on réduit la vitesse, et qu'on le transforme vers sa destinée qui est le boulevard, là on peut réussir. Le boulevard périphérique doit être un trait d’union". Dans les prochains mois, l'un de ces traits d'union se fera entre Paris et Vanves. Un immeuble de 114 logements, à cheval sur le périphérique, doit voir le jour.
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