Reportage
Accord sur les otages entre Israël et le Hamas : espoir et inquiétude mêlés, pour les Israéliens comme pour les Palestiniens

Un accord a été conclu entre Israël et le Hamas pour permettre la libération de 50 personnes retenues en otage par le mouvement islamiste palestinien en échange de la libération par Israël de 150 prisonniers palestiniens. De part et d'autre, il y a beaucoup d'attente, d'espoir mais aussi d'inquiétude.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Une marche pour réclamer le retour des otages détenus par le Hamas, à Motza en Israël le 18 novembre 2023. (JIM HOLLANDER / MAXPPP)

Au Proche-Orient, depuis l'accord trouvé mercredi 22 novembre entre Israël et le Hamas, l’attente des familles est immense. Côté israélien, pour les familles dont les proches sont retenus en otage depuis le 7 octobre par le Hamas ; et côté palestinien, pour les familles dont les proches en prison doivent être libérés. 50 otages doivent être libérés, au rythme de 10 par jour contre 30 prisonniers palestiniens, au cours des quatre jours de trêve observée dans la bande de Gaza. Cette trêve des combats n'entrera pas en vigueur avant vendredi 24 novembre, ont annoncé des responsables israéliens mercredi.

En Israël, les familles ne sauront qu’au tout dernier moment si leurs proches font partie de cet accord, c’est-à-dire au moment où ils seront hors de Gaza, sur le sol israélien. Avant cela, les familles ne sauront rien, le temps que l’armée israélienne sorte vraiment les otages, qu’elle vérifie leur identité. Tout cela doit permettre d'éviter de faux espoirs. 

Malgré ces précautions, ceux qui attendent des enfants se disent quand même que cet accord est fait pour les faire revenir et qu’il ne peut pas en être autrement. Yaël par exemple a vu la petite Galit, 13 ans, grandir à côté de chez elle dans son kibboutz. Elle est comme sa famille, et pour elle, cet accord est un retour certain : "Je suis très émue, très émue de savoir qu’elle va revenir vite". 

"Ça me réchauffe le cœur qu’elle revienne mais j’aimerais bien voir et tous mes amis aimeraient bien voir l’ensemble des otages revenir à la maison."

Yaël, Israélienne

à franceinfo

"C’est vraiment douloureux de savoir que pour le moment, seulement une partie d’entre eux est concernée", poursuit Yaël. Le frère de Galit qui avait 16 ans a été tué et c’est ce qui inquiète Yaël, elle ne sait pas si Galit est au courant, si elle l'a vu se faire tirer dessus. Le retour de la jeune fille suscite autant de joie de la revoir que d’inquiétudes face à son état. 

Il y a aussi ceux qui savent déjà que leurs proches ne seront pas libérés dans le cadre de cet accord. C’est même la majorité des familles, celles qui sont face à la cruauté de l’absence et qui vont le rester encore un moment. Udi Goren est dans cette situation. Il a 43 ans, le même âge à trois mois près que son cousin, Tal, retenu en otage. C'est une certitude, un homme de cet âge-là ne peut pas figurer dans l’accord même si sa femme est enceinte et qu'ils ont trois enfants. 

Pour autant, son cousin veut y voir l’espoir que le canal de négociation reste ouvert. "Tout accord signé est une étape vers le prochain accord qui nous conduira à revoir mon cousin, estime-t-il. Nous n’irons nulle part tant que nous n’atteindrons pas cet objectif. Ils ne peuvent pas ramener tous les otages par la force militaire, ce n’est pas une option, donc ils devront négocier un nouvel accord". Les premiers otages seront pris en charge dans des hôpitaux déjà réquisitionnés, notamment à Tel-Aviv. Les retrouvailles avec les familles auront lieu dans ces établissements. Le premier "debriefing" des otages par les services de renseignement devrait également s'y dérouler. 

Côté palestinien, beaucoup de prudence 

Dans cet accord entre Israël et le Hamas, il est donc question d'échanger 50 otages du Hamas contre 150 prisonniers palestiniens. Des jeunes entre 14 et 18 ans et des femmes doivent être libérés de prison, et notamment Rawan Abu Ziadeh. Cette Palestinienne a désormais 29 ans, elle a passé près de neuf ans en prison. Arrêtée en juillet 2015, près de la tour militaire de son village, elle est accusée d’avoir poignardé un soldat.

Le jour de sa libération, son père, Nafes, l’attend avec impatience mais depuis la maison familiale, à Beitello, un village au nord-est de Ramallah en Cisjordanie, il préfère rester prudent : "Quand il y a des problèmes entre des pays, il y a ce qu’ils disent un jour, et le lendemain, cela n’arrive pas"

"Nous ne crions pas victoire trop tôt car s’il n’y a rien dans les prochains jours, nous serons vraiment déçus."

Nafes, Palestinien

à franceinfo

"Mais évidemment, on l’espère. On dit 'Si Dieu le veut'", résume-t-il. Nafes Abu Ziadeh n’a pas vu sa fille, Rawan depuis qu’elle est dans la prison de Damon, au nord d’Israël. Pour les familles, les visites sont restreintes à une fois par mois, pas plus de 45 minutes, tout se déroule derrière une vitre, au téléphone avec une trentaine de personnes autour. Pourtant, pour s’y rendre, il faut la journée complète et un permis délivré par les autorités israéliennes. "Je n’en ai pas, indique Nafes. Je n’ai pu la voir qu’au tribunal. Après, on m’a dit que j’étais interdit de visite et interdit d’entrer en Israël"

La peine de Rawan se termine officiellement dans huit mois. "C’est toujours comme ça dans les échanges de prisonniers, confie-t-il, juste avant la fin. C’est un jeu, et les Israéliens jouent. Mais comme nous sommes faibles, nous acceptons le peu qu’ils nous proposent. Ceux qui n’ont plus que deux mois sortiront de prison, pas ceux qui ont encore 24 ans"

Nafes ne veut pas encore penser à la musique, aux posters, à cette fête pour célébrer le retour de sa fille. Sa femme, Naimeh, sait ce qu’elle va faire en premier quand elle retrouvera Rawan : "Moi c’est certain, je vais pleurer de joie et la tenir dans mes bras". Tous les deux assurent qu'ils se sentiront "mal de faire la fête et d’être heureux dans ce contexte" où leur "peuple souffre à Gaza"

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