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Beauvau de la sécurité : comment s'organisent les forces de l'ordre au Royaume-Uni et en Allemagne ?

Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction le Royaume-Uni et l'Allemagne pour voir comment la police y est considérée et quelle en est l'organisation.

Article rédigé par Richard Place, Ludovic Piedtenu
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Des policiers entourent un véhicule garé en travers de la route, alors que des activistes climatiques du groupe Extinction Rebellion bloquent la route sur le London Bridge, dans le centre de Londres, le 31 août 2021. (JUSTIN TALLIS / AFP)

Le Beauvau de la sécurité, l'initiative lancée par le gouvernement pour améliorer les conditions d'exercice du métier de policier, s'est achevé mardi 14 septembre par un discours du chef de l'Etat à Roubaix (Nord). L'occasion pour Emmanuel Macron d'annoncer de grandes réformes pour les policiers et les gendarmes, de la simplification des procédures au déploiement de caméras piétons en passant par la transparence de l'IGPN.

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Quelle est la situation à l'étranger ? Nous vous emmenons au Royaume-Uni et en Allemagne.

Au Royaume-Uni, une police bien perçue par la population

Au Royaume-Uni, la police a plutôt une bonne image. C'est même une obligation pour elle, c'est comme ça qu'elle a été pensée, théorisée. Quand la police de Londres a été créée au début du 19e siècle, ses fondateurs ont inventé le concept de "police par consentement". Le principe : coopérer avec la population, être bien perçu par les gens sera plus efficace que les grandes démonstrations de force. Ce principe irrigue ensuite le maintien de l'ordre dans tout le royaume. D'ailleurs à Londres, les policiers que l'on croise au quotidien ne sont pas armés. Et il suffit de se rendre dans une manifestation pour voir que les uniformes adoptent une attitude assez détendue. On les voit régulièrement discuter, plaisanter avec les manifestants.

Évidemment, si la situation se tend, leur comportement change et ils passent au répressif. Mais pas de flash-ball ni de canons à eau : les policiers sont toujours soucieux de l'image qu'ils donnent. Quand le contrôle des foules devient agressif, cela suscite immédiatement de vives réactions dans la société. On l'a vu l'hiver dernier lors d'un rassemblement en hommage à une jeune femme assassinée, un rassemblement interdit à cause des restrictions anti-Covid. Les policiers ont fini par intervenir et l'image d'une femme face contre terre, menottée dans le dos, a fait le tour du Royaume-Uni, et a provoqué de grands débats. Finalement, cette intervention a été jugée légale et maîtrisée.

Il existe d'ailleurs des possibilités de recours contre les policiers. Chaque policier porte ici un matricule sur son uniforme, très visible, au niveau de l'épaule. Ces quelques chiffres permettent de l'identifier en cas de plainte. Des caméras équipent la moitié des agents qui patrouillent. Les images peuvent ensuite servir comme preuve, contre la personne interpellée mais aussi contre celui qui l'a arrêtée s'il s'est mal comporté.

Il y a aussi un équivalent de l'IGPN, la police des polices, l'Independent Office for Police Conduct (IOPC), un office indépendant pour la conduite de la police. Il est inscrit dans la loi que le directeur général de ce service ainsi que tous les membres de la direction ne doivent jamais avoir occupé de fonctions dans la police, une différence majeure avec notre IGPN. Cette instance peut être saisie directement par n'importe qui et elle enquête automatiquement lorsqu'une personne est sérieusement blessée ou tuée après avoir été en contact avec la police. Elle examine aussi es gardes à vue, les échanges de coups de feu ou même les accidents de la route impliquant l'un de ses véhicules. Les rapports une fois terminés sont remis aux policiers mais aussi aux plaignants. On en trouve trace également sur le site de l'IOPC. N'importe quel citoyen peut le consulter.

En Allemagne, une police décentralisée et proche des citoyens

La police allemande est l'une des polices en Europe souvent citée à rebours des pratiques et des techniques musclées à la française. Le rapport entre la police et les citoyens est d'abord beaucoup plus serein et il est plus sain, moins abîmé, même si le pays a connu des affaires de racisme ou de la présence d'éléments avérés d'extrême-droite dans ses rangs.

Mais la culture policière se veut une culture du service, une police au contact, proche des citoyens. Proche aussi parce que c'est une police décentralisée dans chaque Etat du fait de l'organisation fédérale. Les forces sont donc disponibles dans un nombre proportionné à la population de chaque région, comme pour la santé et les hôpitaux, et donc adapté aux problèmes spécifiques locaux. Et puis parfois, quand il y a des grandes manœuvres, les polices entre elles peuvent se prêter main fort. Enfin, la police fédérale assure souvent aux côtés de la police du Land des opérations de maintien de l'ordre qui nécessitent plus d'effectif.

C'est une profession un peu moins attrayante pour les jeunes allemands ces dernières années car ce travail est maintenant associé à la peur et au danger en raison, ces dernières années, du risque terroriste accru. Sortir son arme est plus vraisemblable aujourd'hui qu'il y a une dizaine d'années. Et puisqu'on parle des armes, en voilà une différence avec la France : en Allemagne, les policiers n'utilisent ni flashball, ni grenades de désencerclement. L'ensemble des techniques policières privilégie les interventions non violentes. Le recours à la force est marginalisé, il est utilisé en dernier recours. C'est une doctrine qui existe en Allemagne depuis 1985.

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