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Comment le Maroc, la Belgique et l'Espagne gèrent-ils la difficile question du rapatriement des jihadistes partis combattre au sein de Daech ?

Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction le Maroc, la Belgique et l'Espagne pour comprendre comment ces pays gèrent le rapatriement de leurs ressortissants partis combattre au sein de Daech.

Article rédigé par franceinfo - Seddik Khalfi, Matthieu de Taillac et Angélique Bouin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Des Kurdes emmenent des femmes et des enfants de jihadistes pour les déposer au camp de Al Hol, en février 2019. (CHRIS HUBY / LE PICTORIUM / MAXPPP)

"Emmanuel Macron ne peut pas être celui qui va laisser périr 200 enfants français dans ces camps", a déclaré lundi 23 mai 2022 sur franceinfo Marie Dosé, avocate de l'association Collectif des familles unies qui réclame le rapatriement de Syrie de ces enfants de jihadistes et de leurs mères.

>> "On n’a rien à faire ici…" : l’attente sans fin des orphelins de jihadistes français dans le camp syrien de Roj

Cette problématique du rapatriement de jihadistes et de leurs enfants n'est pas qu'un sujet en France. Direction le Maroc, la Belgique et l'Espagne pour savoir comment ces trois pays gérent ces rapatriements. 

Au Maroc, des retours et des livraisons à la justice 

Selon un rapport du parlement marocain, 1 659 ressortissants marocains sont partis se battre dans les rangs de Daech, en Irak et en Syrie. Certains d'entre-eux sont rentrés de leur propre volonté dans leur pays. "Le chiffre que j'ai, c'est 270 retours. Sur ces 270 retours, un peu plus de la moitié, c'est-à-dire 137, sont transférés à la justice et jugés, explique Moustafa Sehimi, professeur de droit et politologue marocain. Dans ce lot, il y a une centaine de femmes. Nous estimons qu'il y a des faits gravissimes qui ont été commis et la loi marocaine prévoit la sanction de ces actes-là.
 
Les femmes et les enfants, quant à eux, attendent d’être rapatriés des camps de Syrie. Leurs familles ont manifesté devant le Parlement à Rabat, mais la situation est complexe et traitée au cas par cas. "La politique du Maroc, c'est le rapatriement des femmes et des mineurs. Le Maroc estime que ce sont des ressortissants marocains qui ont des droits. Le Maroc entend assumer la responsabilité de ses enfants partout dans le monde. C'est un pouvoir régalien mais c'est aussi un pouvoir de protection de ses ressortissants", détaille Moustafa Sehimi. 

Quant aux combattants arrêtés contre leur gré en Irak et en Syrie, le Maroc espère des accords bilatéraux afin de leur permettre de purger leur peine au pays. 

En Belgique, le rapatriement de tous les enfants de moins de 12 ans 

Plus de 400 belges sont partis combattre en Syrie après le déclenchement de la guerre. Le gouvernement belge actuel assume sa politique de rapatriement de tous les enfants de moins de 12 ans. "Ces enfants n’ont pas à payer pour le choix de leurs parents", a répété une nouvelle fois  la semaine dernière le Premier ministre Alexander De Croo devant le parlement belge. Le pays a récemment dépêché une nouvelle mission consulaire dans les camps du nord-est de la Syrie pour identifier les enfants belges qui s’y trouvent encore. Si les prélèvements confirment la filiation belge, une nouvelle opération de rapatriement pourrait s’organiser.

Ce ne serait pas la première mais depuis la décision politique prise en 2017 de tout faire pour les récupérer, les retours se font au compte goutte. On compte une trentaine d'enfants revenus de Turquie puis de Syrie sur la quarantaine estimée. Le dernier rapatriement a eu lieu en juillet dernier,  Il a permis le retour de dix enfants et de six mères qui vivaient dans un camp syrien. Les six femmes ont été transférées en prison. Cinq d’entre elles avaient déjà été condamnées par défaut pour terrorisme.

Quant aux dix enfants, après un examen médical, ils ont été pris en charge par le service de protection belge de la jeunesse. Les autorités précisent quils ont pu dire au revoir à leurs mamans dans de "bonnes conditions", sans autre précision. Il y a aussi beaucoup de discrétion autour des conditions de vie actuelles de ces enfants.
La plupart  ont été confiés à leurs grands-parents, selon un porte parole fédéral. Ils sont aussi pour la majorité d’entre eux scolarisés.

En Espagne, les autorités ne traitent pas le problème

Dans le cas espagnol, ce sont quatre femmes et 17 enfants qui livrés à leur sort dans les camps syriens. En réalité, les autorités espagnoles ne traitent pas le problème. Il y a trois femmes de nationalité espagnole ainsi qu’une Marocaine épouse d’un Espagnol. Ces quatre femmes, effectivement, ont à leur charge 17 enfants espagnols.

Le ministre de l’intérieur, interrogé par le journal El País en octobre dernier, a affirmé qu’il travaillait pour apporter “une réponse commune dans le cadre de l’Union européenne”. Or, la Commission européenne réplique assez logiquement que “la décision de rapatrier ou non les ressortissants est une compétence nationale”.

En attendant, ces femmes et ces enfants continuent de vivre dans des conditions lamentables dans des camps. En février dernier, la commission des pétitions du Parlement européen, saisie par le père de l’une de ces femmes, a indiqué qu’elle réclamerait des informations au gouvernement espagnol. 

Ces femmes ont exprimé leur désir de rentrer en Espagne. El País a parlé à deux d’entre elles et elles sont conscientes qu’il leur faudrait probablement passer par la case prison. Elles sont fichées et à leur retour, elles seraient accusées au minimum d’appartenance à organisation terroriste, un délit passible de douze ans de prison. 

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