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Guerre en Ukraine : l'accueil des réfugiés en Allemagne et en Autriche

Dans le club des correspondants, franceinfo s'interresse à l'accueil des réfugiés ukrainiens en Europe et notamment en Allemagne et en Autriche.

Article rédigé par franceinfo - Nathalie Versieux et Isaure Hiace
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Des réfugiés ukrainiens prennent des informations dans un salon de l'emploi organisé par la Chambre de l'industrie et du commerce à Berlin, le 2 juin 2022. (JOHN MACDOUGALL / AFP)

La guerre en Ukraine a forcé des millions d'habitants à fuir leur pays et à s'installer dans d'autres pays d'Europe. L'Allemagne et l'Autriche font partie des pays qui accueillent le plus de réfugiés. Si ces pays sont mieux préparés à accueillir ces réfugiés qu'en 2015, des critiques sur la gestion de la question migratoire commencent à se faire entendre.

L'Allemagne est mieux préparée à l’arrivée des réfugiés

L'Allemagne a accueilli depuis le début de l’année 2022 davantage de migrants qu’au cours de l’année 2015. Les communes tirent la sonnette d’alarme. Même si on est loin des scènes chaotiques observées en 2015-2016, lorsqu’un million de réfugiés sont arrivés de Syrie, d’'Irak et d’Afghanistan. Dans un salon de l’emploi, réservé aux réfugiés, nous avons rencontré Tamara. Cette jeune femme est arrivée de Kiev au mois de mars 2022. Elle fait partie de ce million de réfugiés ukrainiens que l’Allemagne a accueilli depuis l’invasion russe. En cette belle journée d’octobre, cette jeune spécialiste marketing s’est rendu au salon de l’emploi spécialement organisé à Berlin par la chambre de commerce et d’industrie à destination des réfugiés. Tamara voudrait créer sa start-up. Son idée, c'est "top secret", lâche la jeune femme car son projet en est au tout début, et c’est directement au stand d’aide aux projets de start-up qu’elle s’est rendue sur le salon.

Ce salon de l’emploi est l’un des nombreux signes qui montrent que sept années plus tard, l’Allemagne est nettement mieux préparée à l’arrivée des réfugiés qu’en 2015-2016. "Ça marche beaucoup mieux, on est beaucoup mieux entraînés qu’en 2015, explique Elanur, qui aide les femmes ukrainiennes. À l’époque, on était mal préparés à l’arrivée de ce très grand nombre de réfugiés surtout ici à Berlin. Mais maintenant, les réfugiés ukrainiens ont directement le droit de travailler, reçoivent tout de suite des cours de langue, ils ont tout de suite des titres de séjour… Pour l’instant, ça marche très bien."

Les Ukrainiens ont bénéficié rapidement du statut de protection temporaire de l’Union européenne. Tout va plus vite pour eux qu’avec les Syriens, les Irakiens ou les Afghans en 2015. Une situation frustrante pour tous ceux qui ont aidé les réfugiés de 2015. "À vrai dire, on a beaucoup moins de travail avec les réfugiés ukrainiens qu’avec les autres, admet Nora Bretzger, qui travaille depuis 2011 comme bénévole auprès des migrants, car on leur a accordé d’emblée tellement de droits. Quand quelqu’un arrive et a directement un titre de séjour, directement accès au marché du logement, directement accès au marché du travail, nous, les associations, nous n’avons pas autant besoin de nous battre. Ce qui est d’une certaine façon amère, car on voit que toutes les revendications que nous avions, en fait, c’est possible. C’est juste qu’il n’y avait pas de volonté politique." Mais si la situation est pour l’instant moins chaotique qu’en 2015, tout pourrait rapidement se dégrader. Déjà, les municipalités s’inquiètent. Partout, les logements manquent pour les nouveaux arrivés, et de nouveau, des salles de sport sont transformées en foyers d’urgence.

En Autriche, des tentes pour accueillir les demandeurs d’asile comme en 2015

Depuis quelques jours, de grandes tentes blanches ont été installées dans plusieurs régions autrichiennes. C’est une décision du gouvernement écolo-conservateur, qu’il justifie par le nombre d’arrivées grandissant de demandeurs d’asile. De janvier à septembre 2022, 72 000 demandes d’asile ont été déposées en Autriche, selon le ministère de l’intérieur, soit près de trois fois plus que sur cette même période en 2021. Le gouvernement explique que les structures d’accueil fixes sont saturées et a donc imposé ces tentes aux régions qui ne respectaient pas leur quota d’accueil de demandeurs d’asile. Les régions concernées s’opposent vivement à cette mesure mais le gouvernement ne compte pas reculer, comme l’a expliqué le ministre de l’Intérieur Gerhard Karner en début de semaine : "Nous avons choisi cette solution afin d'éviter que de jeunes hommes ne cherchent un abri par eux-mêmes. Ces tentes sont destinées à accueillir, lorsque cela est nécessaire, les jeunes hommes venant de pays qui n’offrent quasiment aucune chance d’obtenir l’asile, comme l'Inde, la Tunisie ou le Maroc." Dans certaines régions, les tentes sont déjà occupées.

Les conservateurs, majoritaires au sein du gouvernement, entendent défendre une ligne dure sur la question migratoire. Le chancelier Karl Nehammer a lui-même participé, début octobre, à un sommet sur la migration aux côtés du président serbe Aleksandar Vucic et du premier ministre hongrois, Viktor Orbán. Il avait alors dénoncé l’échec de la politique d’asile de l’Union européenne et affirmé qu’il souhaitait renforcer la coopération avec la Hongrie et la Serbie pour lutter contre l’immigration clandestine. Une position pas assez ferme aux yeux de l’extrême droite. Ces derniers jours, le FPÖ s’est invité dans les débats en critiquant l’installation de tentes et la politique migratoire du gouvernement, réclamant, à la place, la suspension immédiate du droit d’asile. De leur côté, les associations d’aide aux réfugiés tentent elles aussi de se faire entendre. Elles ont adressé une lettre ouverte au gouvernement, dans laquelle elles dénoncent l’installation de ces tentes comme une solution inhumaine et évitable. Nous ne traversons pas une crise des réfugiés, alertent les ONG mais "une crise de l’hébergement", à laquelle le gouvernement pourrait facilement remédier.

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