Le mariage homosexuel est toujours illégal en Pologne et au Japon

En Pologne, après huit ans avec l'extrême droite homophobe au pouvoir, le nouveau gouvernement libéral donne des signes d'espoir de changement en évoquant un projet de Pacs pour tous. Au contraire, au Japon, la droite nationaliste au pouvoir n'affiche aucune volonté de faire évoluer la loi.
Article rédigé par franceinfo - Martin Chabal et Karyn Nishimura
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Le drapeau LGBT pendant la Marche pour l'égalité à Cracovie, en Pologne, en mai 2022. (JAKUB PORZYCKI / NURPHOTO / AFP)

Alors qu'il y a 20 ans, le 5 juin 2004, Noël Mamère, maire écologiste de Bègles, célébrait le premier mariage homosexuel en France, neuf ans avant la loi Taubira légalisant le mariage pour tous, le Club des correspondants fait une première escale en Pologne, un des pays les plus homophobes d’Europe. Et si on est encore loin du mariage des couples du même sexe, l'élection de Donald Tusk en décembre 2023 a donné espoir à la communauté LGBTQ+, après huit ans avec le PiS, l'extrême droite ouvertement homophobe à la tête du pays.

Puis, nous irons au Japon, le seul pays du G7 qui ne reconnaît pas légalement le mariage homosexuel. Il y a peu de chances que la situation change rapidement. Il y a une très forte réticence, pour ne pas dire une vive opposition, de la droite nationaliste au pouvoir depuis près de 70 ans quasiment sans discontinuer, et elle n’a nullement la volonté de discuter sérieusement d’une quelconque évolution de la loi.

Pologne : Donald Tusk veut "redresser les torts"

Le Premier ministre polonais "veut redresser les torts du gouvernement précédent", a-t-il déclaré lors de sa récente élection. Les huit dernières années ont été catastrophiques pour la communauté LGBTQ+. Le PiS, au pouvoir entre 2015 et octobre 2023, était ouvertement homophobe. Il martelait l’idée qu’il existait une idéologie LGBT, qui faisait de la "propagande" dans le pays. Un discours de haine perpétuel qui a débouché sur de véritables lois homophobes. Comme la création de zones anti-LGBT dans certaines villes très conservatrices.

La Pologne s’est attiré les critiques de nombreux acteurs internationaux, et l’Union européenne est même venue sanctionner Varsovie pour ces zones. Bruxelles a bloqué des aides financières aux villes qui ont mis ces zones en place. Finalement, elles disparaissent peu à peu sous la pression, bien qu’il en reste certaines parce que c’est géré par les maires, pas par le Premier ministre. Mais la situation montre bien qu’on est loin d’ouvrir les débats sur le mariage des personnes de même sexe en Pologne.

Un projet de loi "Pacs" pour tous

Donald Tusk a récemment déclaré que son projet de loi pour autoriser l’union civile de couples de même sexe, était prêt. C’était l’un de ses points clés lors de la campagne pour les élections législatives. Mais il a annoncé qu’il attendait la bonne fenêtre d’opportunité pour que toute la coalition à laquelle il est rattaché soutienne le projet. Et là, ce n’est pas gagné. Parce que si le Parti de gauche est pour, les démocrates-chrétiens de la Troisième voie, la deuxième force de la coalition, pourraient s’y opposer. Comme ils l’ont fait pour l’autorisation de la pilule du lendemain d’ailleurs.

À moins que l’Union européenne contraigne la Pologne à autoriser l’union civile de personnes de même sexe. En décembre, la Cour européenne des droits de l’homme a donné raison à cinq couples homosexuels polonais qui ont porté plainte contre leur pays. Ils exigeaient une reconnaissance juridique de leurs relations. La cour a déclaré que la Pologne avait violé la Convention européenne des droits de l’homme et était donc obligée d’introduire une protection juridique pour les couples de même sexe.

Japon : la droite nationaliste au pouvoir traîne des pieds

Le mariage homosexuel n'est toujours pas légal au Japon et l’exécutif n'a pas l'intention de faire évoluer la loi. Il fait traîner le sujet en longueur, comme le montrent les propos le porte-parole du gouvernement, Yoshimasa Hayashi : "Nous pensons qu’il est nécessaire de continuer de suivre attentivement l’opinion des différentes couches de la société, les discussions au Parlement ou encore les recours en justice". Laisser traîner la situation sans rien faire, c’est globalement le même discours depuis des lustres.

Pourtant, des tribunaux ont déjà jugé anticonstitutionnelle la non-reconnaissance dans le code civil du mariage homosexuel. "La reconnaissance du mariage entre deux personnes du même sexe ne fait pas partie des cas prévus par la Constitution. Nous considérons que l’absence de réglementation sur le mariage homosexuel n’est pas contraire à la Constitution", se défend le Premier ministre Fumio Kishida. Il se base sur le fait que les décisions des tribunaux régionaux ne sont pas toutes homogènes ni définitives.

Un couple lesbien obtient l'asile au Canada

La droite japonaise a une vision très étroite de la notion de famille, qui est selon elle constituée d’un père, d'une mère et des enfants légitimes. Les autres cadres familiaux sont considérés, sinon comme anormaux, du moins pas souhaitables. L'opinion publique, elle, a beaucoup évolué et est désormais en majorité favorable au mariage pour tous, mais les puissants groupes d’influence ultra-conservateurs qui se cachent derrière le Parti libéral démocrate (PLD) au pouvoir ont du mal à dissimuler leur réelle aversion pour les minorités sexuelles.

En l’absence de droits véritables, les couples homosexuels reçoivent de la part des autorités locales des certificats d’union qui leur facilitent un peu la vie quotidienne, par exemple pour la location conjointe d’un logement, mais cela est sans valeur légale. Si les agressions physiques homophobes sont rares, la marginalisation sociale des homosexuels reste réelle au point qu’un couple de lesbiennes japonaises a réussi en 2023 à obtenir l’asile au Canada.

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