Résultats des législatives 2022 : les coalitions au pouvoir en Italie, Espagne et Allemagne
Dans "Le Club des correspondants", franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction L'Italie, l'Espagne et l'Allemagne, des pays gouvernés par des coalitions.
Ensemble !, la coalition des partis qui soutiennent Emmanuel Macron , obtient 245 sièges au Palais-Bourbon, loin derrière le seuil des 289 sièges permettant de décrocher la majorité absolue lors du second tour des élections législatives dimanche 19 juin. Face à cette "situation inédite", selon les propres mots d'Élisabeth Borne, la Première ministre s'engage à "construire une majorité d'action."
La France n'est pas le premier pays confronté à l'absence de majorité absolue au Parlement. Plusieurs pays sont habitués à cette situation. Direction l'Italie, L'Espagne et l'Allemagne.
En Italie, des ministres allant de la gauche à l'extrême-droite
Ce n'est pas vraiment une coalition qui gouverne le pays en Italie mais ce que l'on appelle le gouvernement du Président. Le président de la République a choisi Mario Draghi qui n'est pas un politique et lui-même a choisi des techniciens aux postes clés et stratégiques comme l'Économie, mais les deux tiers des ministres sont politiques et vont de la gauche à l'extrême-droite, un spectre très large donc.
Tous les partis, sauf Fratelli d'Italia, ont accepté d'entrer au gouvernement pour une bonne raison, l'Italie a 200 milliards d'euros de fonds européens à dépenser ! Et c'est bien la mission de Mario Draghi. C'est pour cela qu'il a mis des techniciens aux postes stratégiques mais s'assure d'une majorité au parlement en intégrant pratiquement tout l'échiquier politique dans son gouvernement.
>> Italie : chargé de former un gouvernement, Mario Draghi appelle à "l'unité"
Cela fait maintenant près d'un an et demi - février 2021 - que Mario Draghi, président du conseil italien, est au pouvoir et son action permet pour l’instant d'avancer. Notamment parce que Mario Draghi n'est pas un homme de parti, qu'il n'a pas de compte à rendre à d'éventuels électeurs alors il fait passer des lois impopulaires. Il a aussi une mission très claire et qu'il assume depuis le début en insistant sur l'européisme de son gouvernement : c'est réformer l'Italie en échange des fonds européens. La réforme de la justice est donc en voie d'adoption, la réforme de la concurrence aussi. Mais attention il y a des élections générales dans moins d'un an en Italie et déjà certains partis s'émancipent pour jouer leur propre carte. Les politiques veulent reprendre la main, un gouvernement en Italie cela ne dure jamais vraiment longtemps !
En Espagne, l'apprentissage du jeu des alliances
Depuis la fin de la dictature franquiste et pendant près de 40 ans, l’Espagne était habituée au bipartisme, avec une alternance entre les socialistes du PSOE et les conservateurs du Parti Populaire. Il n’y avait donc jamais eu de gouvernements de coalition, à l’échelle nationale. Contrairement au plan local et régional où là le jeu des alliances pour pouvoir gouverner s’est imposé depuis bien plus longtemps. À l’échelle nationale donc, tout a basculé lors des élections de décembre 2015, avec l’irruption de deux nouveaux partis, Podemos et Ciudadanos, qui ont mis fin au bipartisme et aux majorités absolues. Quatre ans plus tard, en janvier 2020, le premier gouvernement de coalition a vu le jour en Espagne, après la signature d’un accord entre Pablo Iglesias, l’ancien leader de Podemos et le socialiste Pedro Sánchez.
Deux ans et demi après, on peut dire que ce n’est pas toujours simple de gouverner en coalition car les tensions et les sujets de discorde n’ont cessé de se multiplier au sein de l’exécutif espagnol, en faisant présager à plusieurs reprises la tenue de nouvelles élections législatives anticipées. Mais aussi bien les socialistes que Podemos ont su mettre de l’eau dans leur vin et faire des concessions au quotidien pour rester au pouvoir. C’est ce qui passe aussi au parlement espagnol où la coalition gouvernementale ne bénéficie pas de majorité absolue et doit donc constamment nouer des alliances avec les autres partis afin de faire adopter les lois. En somme, c’est une nouvelle façon de gouverner en Espagne, qui implique beaucoup plus de débats, de concessions et de tensions qu’au temps du bipartisme.
En Allemagne, les coalitions règnent en maître
Cette situation est corrélée au système politique et la République parlementaire allemande. Ici pour gouverner, les partis n’ont souvent pas le choix que de former des coalitions. Pour une raison simple, les députés du Bundestag, l’équivalent de notre Assemblée nationale, sont issus d’un système de vote mixte, mêlant élections au vote majoritaire, comme en France, mais aussi à la proportionnelle. Cela donne un Parlement très divers. Le Bundestag actuel a des élu(e)s de huit partis. Sans majorité claire. Et comme ce sont ces élu(e)s qui élisent le chancelier ou la chancelière, il faut une coalition.
L’actuel chancelier social-démocrate Olaf Scholz a ainsi formé un gouvernement avec les écologistes et les libéraux. Trois fractions initialement à des années lumières l’une de l’autre politiquement. Mais la coalition à trois fonctionne. C’est l’attitude constructive à l’allemande : travailler ensemble plutôt que s’opposer de façon systématique. C’est la même chose au niveau régional dans les 16 Bundesländer, les 16 États fédérés qui composent l’Allemagne et gèrent des domaines aussi variés que l’éducation, la sécurité ou la culture. Là aussi, ce sont des gouvernements issus de coalitions. Parfois surprenantes. Dans deux Länder par exemple, peut-être trois bientôt, les conservateurs gouvernent avec les écologistes ! Partout, on cherche le compromis. Au final, on a donc souvent des politiques modérées, trop diront certains. Gage de stabilité et de représentativité répondent les autres. La presse allemande appelle d’ailleurs Emmanuel Macron à s’inspirer de l’Allemagne ce lundi après le vote de dimanche.
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