SUV : un accès réglementé au Royaume-Uni et en Suède, une votation à Paris

Ce dimanche, la ville de Paris a organisé un référendum sur la taxation des voitures les plus imposantes dans le centre-ville. Des mesures semblables ont déjà été adoptées à Londres et Stockholm, nos correspondants nous les détaillent.
Article rédigé par franceinfo - Carlotta Morteo et Sara Menaï
Radio France
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Temps de lecture : 8min
Une zone à très faibles émissions bannit les véhicules les plus polluants du centre-ville de Londres, au Royaume-Uni, le 22 juillet 2023. (JUSTIN TALLIS / AFP)

Alors que les Parisiens votaient, dimanche 4 février, pour tripler les tarifs de stationnement des voitures les plus polluantes dans le centre-ville, plusieurs de nos voisins européens ont déjà adopté des mesures similaires. Au Royaume-Uni, une zone à très faibles émissions, bannissant les véhicules les plus polluants du centre-ville de Londres, est en vigueur depuis 2015. D'ailleurs de nombreux touristes, de passage dans la capitale britannique, reçoivent des amendes.

De son côté, la Suède est la première ville au monde à interdire aux voitures thermiques de rouler dans le centre-ville de la capitale. Cette mesure entrera en vigueur à Stockholm, le 31 décembre 2024. Le pays a pris de l'avance dans ses objectifs de décarbonation des transports.

Londres : le maire veut élargir la zone à très faibles émissions

Depuis 2015, la mairie de Londres a délimité une zone à très faibles émissions : l'Ultra Low Emission Zone (ULEZ). C’est un périmètre de la capitale britannique où les conducteurs les plus polluants doivent payer une redevance journalière pour pouvoir circuler dans la capitale. L'ULEZ couvre actuellement tout le centre de Londres et oblige les conducteurs à respecter des normes strictes, encourageant ainsi les Londoniens et les entreprises à passer de véhicules très polluants à des modes de transport plus propres.

À l’époque, la mesure n'avait pas été très bien accueillie. Mais c’est surtout le projet d’extension de cette zone, par le maire de Londres, Sadiq Khan, qui fait grincer des dents ces derniers mois. Restreinte au centre de la capitale à son introduction, la zone va être étendue à tout le Grand Londres, soit une zone de 1 500 km2 qui compte 9 millions d’habitants. Une pétition en ligne a réuni 257 000 signatures et les Londoniens sont descendus dans la rue. "Vous savez, je n'ai jamais protesté de ma vie, mais cette décision de la mairie me met tellement colère", expliquait alors un manifestant.

Les touristes qui traversent le centre de Londres, avec des véhicules très polluants, ne sont pas toujours au fait de la législation locale et sont surpris de recevoir des amendes en rentrant chez eux. Londres est la ville la plus surveillée du monde. Au Royaume-Uni, depuis 30 ans, ce sont près de 6 millions de caméras de vidéosurveillance qui ont été installées sur l’ensemble du territoire britannique et, notamment, sur les feux rouges dans les zones à faibles émissions.

320 000 amendes adressées à des résidents de l'UE

Pourtant, depuis le Brexit, le Royaume-Uni s'est vu interdire l'accès automatique aux données personnelles des résidents de l'Union européenne et donc les conducteurs étrangers ne devraient pas recevoir d’amendes. Selon les gouvernements, des centaines de milliers de citoyens de l'Union européenne ont reçu à tort des amendes pour avoir conduit dans cette ULEZ à Londres.

La ville de Londres a été accusée par cinq pays européens d'avoir obtenu illégalement les noms et adresses de leurs citoyens afin d'émettre plus de 320 000 amendes depuis 2021. Parmi ces pays, la Belgique, l’Espagne, l'Allemagne et les Pays-Bas. En France, plus de 100 conducteurs ont intenté une action en justice, affirmant que leurs données avaient été obtenues de manière frauduleuse. Le scandale a été décrit, par certains, comme étant probablement l'une des plus grandes violations de données de l'histoire de l'Union européenne.

Le porte-parole des libéraux démocrates pour les transports à l'Assemblée a demandé, la semaine dernière, l’ouverture immédiate d’une enquête arguant que ce problème de données et la taxation des conducteurs étrangers pourraient tout simplement nuire à la réputation d'ouverture de la capitale britannique aux visiteurs. Londres compte près de 20 millions de visiteurs internationaux par an dont 10% arrivent via le Shuttle, ce tunnel sous la Manche qui transporte les passagers et leurs véhicules.

Suède : améliorer la qualité de l'air et réduire le bruit

En Suède, les véhicules thermiques seront bannis, à la fin de l'année 2024, du centre-ville de Stockholm. Cette zone ne concerne que la partie la plus dense de la capitale, aux alentours de la gare. Un périmètre, délimité par quatre rues, qui inclut une vingtaine de pâtés de maisons, ainsi que le tunnel Klara, une grosse artère souterraine de 850 mètres de long qui permet de traverser l’hypercentre du Nord au Sud.

Le périmètre n’est pas très étendu, mais ça devrait améliorer la qualité de l’air de manière significative. Une étude du Karolinska Institutet a démontré que les enfants qui grandissent dans les rues du centre ont des fonctions respiratoires plus réduites dès l’âge de six mois, par rapport à ceux qui vivent plus loin. C’est cet aspect de santé publique qui est mis en avant par la municipalité.

Donc dès 2025, seuls les véhicules électriques pourront traverser Stockholm via le centre-ville. Cette mesure est également censée réduire le bruit, un facteur déterminant pour la municipalité. Il est actuellement interdit de faire des livraisons la nuit, dans Stockholm, pour préserver la quiétude. Donc si les camions électriques sont plus silencieux, la ville envisage que les commerces et les bureaux, dans ce quartier d’affaires, puissent être livrés quand les habitants dorment, ce qui devrait, participer à désengorger le quartier la journée.

La Suède fait souvent office de bon élève, le pays a pris de l'avance dans ses objectifs de décarbonation des transports. Le pays a, par exemple, instauré, dès 1991, une taxe carbone qui est de loin la plus élevée au monde. La Suède a aussi interdit la commercialisation des véhicules thermiques neufs dès 2030. Les Suédois qui possèdent une voiture polluante et vieille payent plus d’impôts. Et pourtant, le nombre de voitures diesel a explosé en 15 ans et représente aujourd'hui plus de 35% du parc automobile, contre 8% en 2007.

Le biocarburant remis en question

Le nombre de voitures diesel a explosé en 15 ans et représente aujourd'hui plus de 35% du parc automobile, contre 8% en 2007. Cette hausse s’explique par le fait que c’est une option plus environnementale que le gasoil, car le mix du diesel suédois contient en moyenne 30,5% de biocarburant. Et c’est cette part des biocarburants dans le secteur des transports qui a permis de réduire d’environ 7% les émissions totales de CO2 du pays, chaque année.

Le problème est que ce biodiesel émet autant, voir plus, d’oxydes d’azote qui provoquent des irritations respiratoires, ce qui justifie l’interdiction des diesels à Stockholm. Pourtant le gouvernement de droite, arrivé au pouvoir l’an dernier, a décidé de baisser les taxes sur le diesel et surtout de réduire la part de biocarburants dans le mix pour satisfaire les automobilistes qui trouvaient le prix à la pompe trop cher.

La Suède s’est donc alignée, cette année, sur la réglementation de l’UE, qui prévoit 6% de biocarburants dans le mix diesel, cinq fois moins que celui en vigueur en Suède. Cette mesure, à elle seule, compromet l’objectif climatique du pays de réduire de 70% ses émissions d'ici 2030 dans le secteur des transports. Le pays pourrait donc perdre l’avance qu’il a prise.

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