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Le décryptage éco. Ceta, le jour d’après

C’est donc fait. Après bien des péripéties, et retardé par des désaccords internes à la Belgique, le traité de libre-échange commercial CETA entre l’Union européenne et le Canada a été signé dimanche 30 octobre à Bruxelles. Tout n’est pas fini pour autant. On peut même dire que le plus difficile commence.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Justin Trudeau, Premier ministre du Canada est venu signer le Ceta à Bruxelles, le 30 octobre 2016. (THIERRY MONASSE / POOL)

La prochaine étape sera la ratification par les parlements européen et Canadien. Cela devrait être une formalité réglée, dit-on, d’ici décembre ou janvier.

C'est l’étape suivante qui est loin d'être évidente. Le texte devra être ratifié par les différents parlements nationaux et régionaux des Etats-membres. Là, rien n'est gagné, d'autant que le Ceta pose problèmes avec la Constitution de plusieurs pays, notamment la France. Un seul exemple : dans les 1 500 pages du Traité Ceta, à aucun endroit le principe de précaution n'est mentionné, alors qu'il a été introduit dans notre Constitution en 2005. Une faille très facilement exploitable par les ennemis du traité.

La Belgique a obtenu quelles garanties supplémentaires ?

Sur le fond, le psychodrame dans lequel la Belgique s’est illustrée à travers le différent wallon reflète beaucoup plus les querelles internes au pays qu’une réelle remise en question du traité commercial en tant que tel.

D’ailleurs, la substance du traité n’a pratiquement pas changé. Le compromis belge est intervenu sur de faibles avancées, dont la vérification de la conformité d’un tribunal arbitral avec le droit européen. D’apparence technique, ce point est crucial. Très contesté le tribunal arbitral est chargé de trancher dans d'éventuels conflits entre négociateurs. Il renforcerait le poids des multinationales et donc des lobbies, interférant avec les États. Un mélange des genres malvenu et très dangereux.

L’épisode belge peut-il avoir un impact sur les autres traités en cours de négociation, notamment le Tafta ?

L’épisode belge sur le Ceta marque un tournant dans la mesure où il redonne toute sa place à la dimension démocratique du débat. Le Ceta est un appel à une plus grande transparence dans les discussions. les négociateurs devront entendre le message. En ce qui concerne le Tafta - ou Ttip -, les plus fins observateurs voient mal comment ces négociations entre l’Europe et les États-Unis pourraient réellement aboutir tant elles ont été mal engagées, mal menées. Et puis, désormais, elles seront regardées à travers le prisme de la contestation belge qui fera des émules.

Même les plus optimistes, qui ne s’attendaient pas à une signature sous la présidence Obama, estiment aujourd’hui que le Tafta ne sera jamais signé, que c’est un accord mort-né.

 

Est-ce que c’est réellement problématique pour l’Europe ?

 

Faute d’accords commerciaux de libre échange passés avec d’autres grandes régions du monde, l’Europe est en train de céder progressivement son leadership économique. La Chine, l'Inde et d’autres pays émergents n’attendent que cela pour passer des accords en parallèle - notamment avec les Etats-Unis - et conquérir des marchés dont nous nous excluons de fait. Depuis cinquante ans, les négociations commerciales internationales ont permis de créer un ordre multilatéral sans précédent dans l’histoire, dicté par la notion de droit. C'est cet ensemble très élaboré, qui a contribué à la prospérité de l’occident et du reste du monde, qui est en train d’être remis en question.

Demain ce seront les normes internationales qui s'imposeront à nous et non plus l'Europe qui sera en capacité d’imposer les siennes. Des normes pourtant d'un haut niveau juridique et d'une grande exigence qualitative. Ça ne sera pas la faute des opinions publiques mais des institutions et des négociateurs qui n'auront pas su expliquer ni convaincre.

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