Le décryptage éco. La Sécurité sociale à l'équilibre, faut-il y croire ?
Les comptes de la Sécurité sociale seraient quasiment revenus dans le vert, selon la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine. Y a-t-il eu un miracle ?
C'est une histoire ancienne : le fameux "trou de la Sécu" serait aujourd'hui quasiment résorbé. Mais il faut regarder dans les détails.
D'abord, oui c’est indéniable, il y a une très nette amélioration des comptes de la Sécurité sociale. Ce n’est pas encore l’équilibre, mais si cette tendance se poursuit, cela veut dire qu’en 2017, ils afficheront les meilleurs résultats depuis près de quinze ans. Les comptes de toutes les branches s’améliorent, le régime général – qui comprend la maladie, la retraite, la famille et les accidents du travail - sera, selon la ministre, à 400 millions d’euros de l’équilibre, c’est à dire "l’épaisseur du trait".
C’est bien évidemment une nouvelle importante. Et on comprend que la ministre Marisol Touraine n’ait même pas attendu la présentation officielle du projet de loi vendredi 23 septembre pour se réjouir.
Alors bien sûr, il faut regarder dans le détail et se méfier des effets d’annonce. On se souvient que Martine Aubry, en 2002, alors ministre des Affaires sociales, nous avait déjà dit un peu la même chose. Il y avait eu du mieux un court instant et puis les déficits s’étaient creusés à nouveau à grande vitesse. Essentiellement parce qu’à l’époque, l’amélioration des comptes était largement due à la croissance. La bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas le cas aujourd’hui, ce n’est pas à la croissance, trop faible, qu’on doit cette amélioration des comptes.
Comment expliquer cette réduction des déficits ?
Les déficits sont réduits en partie grâce à des mesures structurelles, c'est à dire pérennes. Tout le monde a pu s’en rendre compte, il y a eu de nombreux coups de rabots, notamment sur les remboursements. Une utilisation beaucoup plus fréquente aussi des médicaments génériques, des fermetures de lits d’hôpitaux, des séjours plus courts à l’hôpital, la lutte contre les actes inutiles et surtout la lutte contre les fraudes, qui a rapporté plus d’un milliard d’euros en 2015, c’est un record.
Un édifice qui reste fragile malgré tout
Mais il y a aussi des dépenses nouvelles qui sont programmées : la revalorisation de la consultation standard à 25 euros le premier mai prochain, un coup de pouce pour les fonctionnaires hospitaliers... Les dentistes libéraux, les kinés, les pharmaciens pourraient aussi bénéficier d’un geste. Donc la facture pourrait grimper à nouveau. Du coup, le gouvernement a inscrit dans le prochain budget de la Sécurité sociale un plan assez massif d’économies nouvelles : quatre milliards dès 2017.
Ce ne sera pas facile à faire. D’autant que la Cour des comptes réclame encore une réforme en profondeur de l’Assurance maladie : elle estime que 40% du déficit résulte de causes structurelles, indépendantes de la conjoncture.
Cette amélioration des comptes de la Sécurité sociale pourrait-elle devenir un argument électoral ?
Oui, et c’est déjà le cas. "L’histoire de ce quinquennat, c’est la fin des déficits sociaux", affirme déjà Marisol Touraine dans le journal Les Echos. Plus globalement, sur l’ensemble des déficits publics, le président Hollande et futur candidat voudra démontrer qu’il a tenu sa promesse de sérieux budgétaire, avec un déficit public sous la barre des 3% en 2017. Mais ce chiffre-là, cette estimation officielle est beaucoup plus contestée encore que le redressement de la Sécurité sociale. Entre les dépenses nouvelles et les gestes fiscaux de cette période pré-électorale, la Cour des comptes a déjà sonné l’alarme.
Trou de la Sécu : faut-il croire au miracle ? par franceinfo
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