Danone retire le Nutri-score de ses yaourts à boire : "Ce n'est pas aux industriels de fixer les règles du jeu", rétorque le créateur du Nutri-score
"Ce n'est pas aux industriels de fixer eux-mêmes les règles du jeu", rétorque le professeur Serge Hercberg, créateur du Nutri-score, épidémiologiste et nutritionniste, invité jeudi 5 septembre sur franceinfo, alors que Danone annonce retirer l'indication sur ses yaourts à boire défavorablement notés. L'industriel français dénonce un changement du mode de calcul qui passe ses yaourts à boire de la catégorie produits laitiers à la catégorie boissons sucrées et entraîne une forte dégradation de sa note sur certains produits, de B à D.
"C'est regrettable de la part de Danone de refuser la transparence sur la réalité de la qualité nutritionnelle de leurs produits et surtout d'accepter de jouer le jeu quand ça les arrange et de refuser quand ils considèrent que ça ne les arrange plus", estime le professeur. "De la part de Danone, c'est particulièrement choquant parce qu'on attend d'une société comme celle-ci, qui a un engagement social très affirmé sur le plan de la nutrition et de la santé, une attitude moins marketing, dans la défense des consommateurs", tacle-t-il.
Selon lui, le changement du mode de calcul est tout à fait normal puisque "la science évolue, le marché alimentaire évolue également, et on a eu des progrès dans les connaissances scientifiques". "Le Nutri-score est basé sur des données scientifiques, sans conflit d'intérêts", explique son créateur, "il prend en considération ce qui est sur l'étiquette, mais souvent incompréhensible dans les tableaux, comme le gras, le sucre, le sel, les protéines, les fibres, etc., et grâce à un algorithme qui a été validé scientifiquement, il aboutit à ce classement et il est mis à jour régulièrement".
L'ambiguïté des grands groupes agroalimentaires
Le changement de catégorie des yaourts à boire de produits laitiers à boissons est "légitime" puisqu'ils sont consommés comme tels, selon lui "un yaourt solide, on le donne à des enfants en fin de repas ou au goûter, un yaourt à boire, ce sont plus des produits qui sont consommés en dehors des repas et donc leur donner une note extrêmement valorisante peut pousser à une surconsommation".
Il précise également que certains yaourts à boire sans sucre peuvent être bien classés "mais certains sont faits avec beaucoup de sucre et c'est légitime qu'ils soient moins bien classés". "C'est hypocrite de la part de Danone de considérer que pour le yaourt à boire, la règle scientifique est mal faite, par contre pour ses eaux minérales faiblement sucrées, qui sont bien classées, elle ne critique pas la démarche scientifique", pointe-t-il.
Selon Serge Hercberg, "il faut laisser aux scientifiques, aux experts en nutrition les choix qui sont dictés par la science et la santé publique". Il plaide pour rendre le Nutri-score "obligatoire sur tous les produits", rappelant qu'il est plébiscité par "90% des consommateurs", mais que certains groupes comme Lactalis, Ferrero ou Coca-Cola "le combattent". Rendre le Nutri-score obligatoire, pour Serge Hercberg, "c'est la seule façon de forcer la main à ces sociétés et de permettre aux consommateurs d'avoir une information fiable et basée sur la science".
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