"Homicide routier" : le chef étoilé Yannick Alléno dont le fils a été tué par un chauffard ivre et sans permis croit "en l'effet pédagogique de cette loi"
"On choisit de se droguer, on choisit de boire volontairement et ensuite de mettre la vie d'autrui en danger", affirme sur franceinfo lundi 29 janvier Yannick Alléno, chef cuisinier étoilé et fondateur de l'Association Antoine Alléno, en hommage à son fils de 24 ans, tué par un chauffard ivre et sans permis, en mai 2022. Alors que l’Assemblée examine lundi une proposition de loi sur l’instauration d’un délit d’homicide routier, Yannick Alléno, croit "beaucoup en l’effet pédagogique de cette loi".
franceinfo : Pourquoi était-il important à vos yeux de changer cette loi ?
Yannick Alléno : Près de 3 500 personnes en France, plus de 500 jeunes succombent du fait de violence routière et d'homicide routier, donc je crois qu’il est important de faire qualifier une infraction autonome pour traiter ce mal. Quand on vous dit que votre enfant est parti de façon "involontaire" un dimanche soir, alors qu'il rentrait du travail, alors que la drogue, l'alcool, voler des voitures et rouler trop vite en milieu urbain font partie d'un acte volontaire. On choisit de se droguer, on choisit de boire volontairement et ensuite de mettre la vie d'autrui en danger. Et c'est cela qu'on essaie et qu'on va obtenir.
Certains détracteurs de cette loi disent que ce n’est que de la sémantique, ce ne sont que des mots, car elle ne prévoit pas de peines plus lourdes. Qu’est-ce que vous en dites ?
C'est une nouvelle loi. Ce n'est pas quelque chose de sémantique, ça permettra à la justice française de faire son travail avec beaucoup plus de finesse. Ce que l'on appelle aujourd’hui des circonstances aggravantes en cas d'homicide involontaire feront partie de cet homicide avec une infraction autonome. Et je crois que le code pénal est déjà bien fourni de sentences, avec entre sept ans et dix ans d'emprisonnement. Mais généralement, 40 % des gens qui font ces actes ne vont pas en prison, ou un an et demi versus sept ans. Donc, ça ne sert à rien d'augmenter les peines, simplement il faut les appliquer. Ça sera déjà un grand pas pour les familles et les victimes.
La peine moyenne, en effet, constatée sur des homicides involontaires aggravés sur la route, est entre 16 mois et 28 mois, quand il y a deux circonstances aggravantes comme l'alcool et la drogue ou l'alcool et la vitesse. L'un des arguments pour ce changement de loi, c'est la dissuasion. Vous y croyez, au fait que le simple fait de changer les mots, ça permette de dissuader ?
Je crois beaucoup en l'effet pédagogique de cette loi, au sens où quand on donnera aux jeunes Français le permis de conduire, on pourra leur dire : "attention, tu vas avoir une sanction très importante" si tu tues quelqu’un. Ça changera la donne. Les gens qui prendront leur voiture auront ça en tête et auront d'autres réflexes, et je pense que la courbe des décès de notre jeunesse descendra de façon drastique.
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