Daniel Auteuil incarne un avocat pénaliste dans "Le Fil" : "un métier dans lequel on est en prise directe avec l'humanité"
Avec 14 nominations aux Césars, deux César pour son rôle d'Ugolin Soubeyran dans Jean de Florette et Manon des Sources puis un pour celui de Gabor dans La Fille sur le pont, Daniel Auteuil est un des acteurs les plus aimés et reconnus du cinéma français. Avec un héritage transmis par ses parents, chanteurs lyriques d'opéras et d'opérettes, il s'est lancé dans la scène, les planches, la musique, tout l'attire et tout l'intéresse. Aujourd'hui, il est devant et derrière la caméra, dans son nouveau film Le Fil, qui sort mercredi 11 septembre.
Il y incarne Maître Jean Monier, avocat pénaliste, chargé de défendre un père de famille accusé du meurtre de sa femme. Cette nouvelle réalisation est basée sur une histoire vraie.
franceinfo : Six ans après la comédie Amoureux de ma femme, vous passez donc de l'amour à la haine.
Daniel Auteuil : Oui, je passe de l'amour à la haine, mais encore mêlé à de l'amour, parce que ces métiers d'avocat, ce sont des métiers emplis d'humanité. Pendant la préparation de mon film, j'ai eu la chance d'être invité à un procès à huis clos. J'ai ressenti toute la profondeur, la difficulté et l'humanité de ce métier d'avocat souvent décrié.
"Le métier d’avocat est un métier absolument difficile. Cela m'a fait penser au métier de policier, au métier d'infirmière. Des métiers dans lesquels, on est en prise directe avec l'humanité. La moindre erreur qu’on puisse commettre étant fatale."
Daniel Auteuilà franceinfo
On me dit souvent, mais avocat et acteur, c'est pareil. Non, ce n'est pas pareil. Et ce qui diverge, c'est la conclusion. Si je rate mon rôle, je frise le ridicule, mais je n'en meurs pas. Alors que si je suis avocat et que je me trompe, le type ou la femme peut prendre 20 ans de prison et le destin des gens bascule. Et ce qui m'a surpris, c'est que la réalité a tellement plus d'imagination que la fiction. Ça m'a bouleversé.
Dans le film, vous défendez avec une intime conviction d'innocence. C'est quoi l'intime conviction ?
L'intime conviction, c'est au plus profond de sa conscience, c'est le degré de perception qu'on a sur la véracité des propos de l'autre et sur le fait d'être sûr de son innocence. Quand c'est parole contre parole, il n'y a pas de preuves. Pas de preuves, pas de mobile, pas de témoin. Et c'est là où je comprends à quel point le public est fasciné par ces histoires de procès, de films policiers. En assistant moi-même à ce procès pendant trois jours, j'oscillais tous les jours. Mais oui, il est innocent ! Mais non il est coupable ! Il y a aussi une chose qui m'a touché, c'est que souvent ceux qui n'ont pas accès à la parole qui sont facilement coupables parce qu'ils ne peuvent pas se défendre. D'où le travail des avocats.
Vous avez trois casquettes sur ce film. Acteur, vous êtes aussi au scénario et à la réalisation. Vous doutiez à un moment donné de revenir à la réalisation.
Oui. J'étais reparti dans des aventures d'acteurs extraordinaires, avec des gens passionnants. Je pensais que c'était terminé jusqu'à ce que Nelly, ma fille et productrice, m'amène cette histoire. Mais entre le moment où j'ai lu la première fois et au moment où on a tourné, il a fallu trois ans. Il a fallu que je m'accapare cette histoire, que je la fasse mienne. Il fallait que je trouve un parallèle entre ma vie, mon métier d'acteur et cet avocat qui se remet à plaider en assises, comme moi je me remets à faire de la mise en scène.
"Cela demande plus que de l'énergie, c'est une force de vie magnifique de faire un film. Il fallait que je retrouve cette force. Je l'ai trouvée et je suis bien heureux d'avoir réalisé ‘Le Fil’."
Daniel Auteuilà franceinfo
Ça vous apporte quoi de jouer ?
C'est ma vie. Je suis né pour jouer et je mourrai un jour, je ferai semblant de mourir. Jouer, ça m'apporte, malgré les rôles les plus durs, les plus compliqués et les plus obscurs, cela m'apporte une légèreté et un plaisir. Et plus c'est douloureux, plus c'est dramatique et plus c'est jouissif, parce que ce n'est pas pour de vrai, c'est pour de faux. Nous, on n'a pas à souffrir, c'est à vous de souffrir, d'être ému et de pleurer. Nous, on a juste à être convaincants.
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