"Je n'ai rien compris à ce qui m'arrivait" : Elsa Wolinski lève les tabous sur la ménopause avec le podcast "Allez, j'ose !"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Jeudi 1er février 2024 : la journaliste et écrivaine, Elsa Wolinski. Elle anime un podcast qui brise un tabou, celui de la ménopause, "Allez, j'ose !"
Article rédigé par franceinfo, Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Elsa Wolinski, écrivaine et journaliste. (franceinfo)

Elsa Wolinski est écrivaine, journaliste et une femme engagée. Évidemment, comme son nom l'indique, on sait de qui elle tient. Fille de Maryse et Georges Wolinski, elle a voulu au départ s'émanciper d'un milieu, puis rapidement, elle s'est rendu compte qu'elle aussi était faite pour le journalisme. Donc elle s'y est consacrée, puis s'est investie dans l'écriture de livres avec en 2007, J'ai pas épousé mon père.

Quand son père a été assassiné en janvier 2015, elle s'est immédiatement positionnée hors de toute récupération possible et aujourd'hui, elle est aux côtés des femmes avec son podcast "Allez, j'ose !". Elle y dézingue l'omerta et toutes les certitudes liées à la ménopause.

franceinfo : Comment est née cette envie de podcast ?

Elsa Wolinski : Mais j'étais en pleine ménopause ! Je n'ai rien compris à ce qui m'arrivait. C'est-à-dire que du jour au lendemain, mon comportement a changé, j'ai eu des cystites à répétition, j'ai tout eu ! La liste est une liste à la Prévert. Je n'avais que des trucs que personne ne comprenait. Il y a un moment, je me suis dit qu'il devait s'agir de la ménopause ou de la préménopause.

J'ai tellement galéré, j'ai été dans une telle errance personnelle... Et puis je me suis rendu compte que quand j'en parlais, les femmes étaient un peu gênées. Je suis allée à Marseille, il n'y a pas longtemps, et une fille m'a dit : "Ah non, ça ne passe pas par nous !" Mais comment, ça ne passe pas par vous ? Il y a des femmes ménopausées à Marseille, ça passe par tout le monde ! On est 14 millions de femmes à être ménopausées, 500 000 femmes sont en préménopause et elles ne le savent pas. Il faut bien en parler quand même.

Vous avez eu besoin de faire une cure. Celle-ci vous a d'abord permis de retrouver la confiance que vous n'aviez jamais vraiment eue en vous et de prendre conscience qu'il fallait lâcher prise.

J'ai surtout fait cette cure de 21 jours, ce jeûne, parce que je voulais arrêter les antidépresseurs. J'ai pris des antidépresseurs pendant 14 ans et quand ma mère est décédée, elle m'avait dit : "Quand je vais mourir, je veux que tu m'apportes ma poupée". Et quand je lui ai mis la poupée dans les bras, je me suis dit : "Mais moi on va me mettre quoi ? Mes antidépresseurs ?" Je me suis dit non, j'arrête. Et pour arrêter ça n'a pas été simple. C'est vrai que le jeûne m'a beaucoup aidé. À côté de cela, j'ai été boulimique pendant des années, ce qui a un rapport avec la confiance en soi, parce que physiquement, je ne m'aimais pas. Je m'aime un peu plus aujourd'hui. Ce n'est pas toujours facile. J'ai eu besoin de faire cette cure pour commencer à arrêter mes antidépresseurs et pour mettre du vide dans du plein.

Vous avez dit que pendant très longtemps, vous vous étiez rendu compte que vous regardiez la vie à travers les yeux d'un homme, donc de ceux de votre père. Et en même temps, vous avez beaucoup de votre mère.

Je m'en rends compte depuis qu'elle est décédée. Je ressemble énormément à ma mère. C'est effectivement quelqu'un qui avait un caractère bien trempé, pas facile. On n'avait pas des rapports conflictuels mais compliqué.

En fait elle avait un regard sur vous ? Il fallait être très mince pour elle. Et ça a été dur pendant longtemps ?

Ce n'est pas qu'il fallait être très mince. Elle disait : "Regarde tes filles comme elles sont minces, elles sont belles. Oh regarde cette femme comme elle est mince, comme elle est belle !" Et à côté de ça, elle n'était pas très tendre.

"Moi, j'avais cette sensation que j'avais une maman qui sentait plutôt le Shalimar que le gâteau."

Elsa Wolinski

à franceinfo

Vous rencontrez beaucoup de femmes dans ce podcast. Les échanges à chaque fois ont lieu dans des parcs, dans des endroits où il y a de l'air, de l'oxygène, on sent presque le vent qui nous traverse.

Oui, c'était très important.

Azucena Pagny, Axelle Red, Gwendoline Hamon etc. Vous êtes allés chercher des regards féminins forts et une libération de la parole ?

Pour l'instant, on est allés rencontrer des femmes influentes, parce que c'est tellement incroyable que ces femmes-là libèrent cette parole-là. Elles osent parler de ce qui se passe dans leur culotte ! Azucena va nous parler de la sécheresse vaginale. C'est quand même très intime.

"En racontant leur intimité, toutes ces femmes libèrent la parole. Elles ont beaucoup de générosité parce qu'elles sont dans la transmission, elles ont envie de donner aux autres."

Elsa Wolinski

à franceinfo

Vous aussi êtes dans la transmission. Est-ce facile de rester debout quand on a ce tempérament-là ?

C'est très fatigant, mais je prends soin de moi quand même. À Noël, mes filles m'ont dit que j'étais devenue une maman triste et que je travaillais trop. Ça m'a beaucoup bouleversée, ça m'a fait beaucoup de mal. J'ai entendu et je me suis dit qu'il fallait mettre des limites.

Ce qu'on comprend aussi à travers ce podcast, c'est à quel point on peut changer notre regard sur cette ménopause et aussi à quel point on peut accepter sa vulnérabilité.

Moi, c'est mon champ de bataille. C'est au moment de l'attentat, pour être très honnête, où j'ai compris que j'étais juste plus sensible que les autres et que je ne trouvais pas que c'était grave de dire : je pleure, je suis triste. Quand j'ai commencé sur les réseaux sociaux à le dire, j'ai reçu un nombre énorme de messages de femmes qui disaient : "Mais merci", parce que dans notre société, on n'a pas le droit de se sentir mal, on a le droit que d'être performant. On ne peut pas être performant tout le temps.

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