"La curiosité, c'est un délice !" : la dernière interview d'Agnès Varda
Le 11 janvier, franceinfo recevait Agnès Varda, dont on a appris la mort vendredi 29 mars. Dans "le monde d'Elodie Suigo", la photographe et réalisatrice donnait sa dernière interview.
La cinéaste Agnès Varda est décédée vendredi 29 mars à l'âge de 90 ans des suites d'un cancer. Du 16 au 28 janvier dernier, la Cinémathèque de Paris avait consacré quinze jours à la photographe et réalisatrice. A cette occasion, elle s'était confiée à Elodie Suigo sur franceinfo. C'était la dernière interview en tête à tête de la photographe et réalisatrice, qui annonçait quelques jours plus tard lors du festival du film de Berlin qu'elle "se préparait à dire au revoir".
De la photo au cinéma
Agnès Varda explique alors que sa tendance artistique ne lui vient pas de ses parents : "Mon père n'était pas du tout intéressé, puis je n'avais pas beaucoup de rapports avec lui. Ma mère avait cette tendance artistique, mais elle s'est intéressée sur le tard à ce que je faisais."
Mes parents ont laissé tomber. Je trouve que ce n'est pas sur les parents qu'il faut baser le travail d'une vie.
Agnès Vardaà franceinfo
Agnès Varda étudie la photo à l'École des Beaux Arts de Paris, mais cette passion lui est venue presque par hasard : "Je pensais que c'était un métier intéressant. Je n'avais jamais eu d'appareil amateur, je n'avais jamais fait de photos comme ça. J'ai commencé puis j'ai appris un peu. J'aimais bien parce que c'était de l'artisanat, il fallait faire développer ses photos soi-même." Elle devient ensuite la photographe de l'équipe de Jean Vilard. Un peu de la même manière, elle entre dans le monde du cinéma comme dans tout ce qu'elle a fait, sur une envie soudaine.
J'ai eu envie de faire un film, je l'ai écrit, et par un ensemble de hasards il s'est fait.
Agnès Vardaà franceinfo
Sa vie, elle la passait entre photos, films et l'homme de sa vie, Jacques Demy : "Toute notre vie commune, on n'a jamais travaillé ensemble. Son univers venait de ses rêveries d'adolescent, des valeurs qu'il avait dans son enfance, et dans son désir de rendre les gens heureux, ça n'avait pas de rapport avec ce que j'aimais faire. Moi j'étais dans le documentaire, dans le monde réel, ça ne l'intéressait pas ou peu."
Le monde des vrais gens m'a toujours passionné. Je trouve beaucoup d'inspiration dans la réalité des gens, particulièrement ceux qui sont différents de moi, ceux qui sont démunis. On apprend beaucoup plus d'eux que de nos voisins qui sont comme nous.
Agnès Vardaà franceinfo
Une femme de conviction
Féministe dans sa manière d'être et de vivre, Agnès Varda l'a toujours été : "Je crois que je suis née féministe. J'ai toujours pensé qu'il fallait mettre en avant la capacité des femmes à faire des choses aussi bien que les hommes. Ce n'est pas l'idée de la parité au sens où on compte les points. C'est l'idée que les femmes sont capables."
Le cinéma, un monde pas toujours facile : "Il y a des hauts et des bas. Une vie d'artiste c'est quand même une sorte d'aventure intellectuelle. C'est aussi un problème de se battre avec l'argent dans une société qui met la richesse en valeur. Je n'ai jamais voulu faire de pub, que le peu de talent que j'ai serve à vendre. Je peux dire que j'ai été courageuse."
Agnès Varda est aussi caractérisée par une grande curiosité : "Dans la vie, il y a les curieux et les inertes, moi je suis de la première catégorie. Il y a beaucoup de choses qui m'intéressent, je suis toujours en contact avec ce qui m'intéresse. La curiosité, c'est un délice, c'est une base de vie !" Une base sur laquelle la cinéaste se sera donc appuyée et aura développée toute sa vie.
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