Le monde de Marie. En Ukraine, la réapparition du journaliste Arkadi Babtchenko au lendemain de l'annonce de son assassinat
Tous les jours, Marie Colmant revient sur un sujet passé (presque) inaperçu. Aujourd'hui, la réapparition publique d'un journaliste russe qu'on croyait mort, assassiné par les services russes.
Tous les grands médias de la planète ont annoncé la mort d’Arkadi Babtchenko, journaliste russe abattu de trois balles dans le dos mardi 29 mai à Kiev. Coup de théâtre mercredi dans l’après-midi, Arkadi Babtchenko apparaissait bien vivant à la télévision ukrainienne. Que s’est-il passé ?
Kiev, c’était la ville où ce journaliste de 41 ans avait trouvé refuge, après avoir quitté la Russie il y a un peu plus d’un an. Arkadi Babtchenko avait craqué sous la menace d’une campagne d’intimidation et décidé de quitter le pays, d’abord pour Israël puis l’Ukraine, un pays qu’il connaissait bien pour avoir couvert le conflit en 2014. Que lui reprochait-on ? Une "attitude anti patriotique".
Cloué au pilori pour "antipatriotisme"
En février 2017, au moment où la Russie est sous le coup d’un crash aérien qui a couté la vie à des chanteurs des Chœurs de l'Armée rouge. Sur sa page Facebook, Arkadi Babtchenko écrit que ces morts l’indifférent, rappelant que ces hommes étaient partis en Syrie pour divertir les pilotes russes qui menaient à l’époque des raids mortels sur Alep. Des députés interpellent le gouvernement : il faut lui interdire d’écrire. La première chaîne russe, la chaîne officielle, lance une pétition pour lui retirer sa citoyenneté russe et l’expulser. Et ainsi de suite jusqu’à ce que son adresse personnelle soit publiée sur Internet, et que son nom soit inscrit sur la liste des 100 ennemis de la Russie.
A Kiev, son dernier refuge, les services secrets ukrainiens le suivent de près, apprennent qu’un projet d’assassinat est en cours. Ils décident alors de tendre un piège au tueur, en l’attendant au domicile du journaliste. Mission accomplie, l’assassin est arrêté et même identifié comme un tueur à gages régulièrement employé par les services secrets russes.
Arkadi Babtchenko n’était pas n’importe quel journaliste russe. D’abord parce qu’il travaillait pour l’unique journal d’opposition, la Novaïa Gazeta où son bureau voisinait avec celui d’Anna Politkovskaia, journaliste assassinée en octobre 2006. Arkadi Babtchenko y était reporter de guerre, un terrain que cet ancien appelé en Tchétchénie connaissait bien. Pour sortir du trauma, Arkadi Babtchenko a écrit un livre majeur sur cette sale guerre, balançant la réalité peu reluisante d’une Armée rouge en faillite, de soldats qui crèvent de faim et d’officiers ivres morts H24. C’est à partir de ce moment qu’il devient journaliste.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.