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Ketanji Brown Jackson, nouvelle juge à la Cour suprême américaine et (petite) victoire pour Joe Biden

C'est "un jour historique" aux états-Unis pour le président américain Joe Biden. Pour la première fois, une femme noire va siéger dans le temple du droit américain, la Cour suprême. Son nom : Ketanji Brown Jackson.

Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Ketanji Brown Jackson, nouvelle juge à la Cour suprême américaine. (JIM WATSON / AFP)

Ketanji Brown Jackson, 51 ans, magistrate brillante nommée par le président démocrate Joe Biden juge à la Cour suprême, a été confirmée jeudi 7 avril par le Sénat : 53 votes pour, 47 contre. Ça passe ric-rac, mais à l'annonce du résultat du vote, la vice-présidente américaine et présidente du Sénat, Kamala Harris, affiche un sourire radieux. Les sénateurs républicains quittent l'hémicycle. Les démocrates eux, se lèvent pour une standing ovation.

"C'est un jour merveilleux", dit le chef de la majorité démocrate Chuck Schumer, "un jour de joie, un jour exaltant pour le Sénat, pour la Cour suprême et pour les États-unis". Jusqu'ici, 115 juges ont siégé depuis la création de l'institution, il y a 233 ans : parmi eux il n'y a eu que cinq femmes (blanches) et deux hommes noirs.

Juge fédérale contre l'administration Trump

Fille d'enseignants, Ketanji Brown Jackson a étudié à Miami dans le même lycée que Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon. Par "fierté de leur héritage" et "espoir en l'avenir" a-t-elle dit au Congrès, ses parents lui ont donné un prénom africain, Ketanji Onyika, ce qui veut dire "la charmante"

Diplômée en droit de la prestigieuse université de Harvard, mariée à un chirurgien, elle est nommée en 2009 vice-présidente de la Commission fédérale des sentences par Barack Obama, une agence indépendante chargée d'harmoniser la politique pénale aux États-Unis. Elle devient ensuite juge fédérale, ce qui lui donne l'occasion de statuer plusieurs fois contre l'administration Trump. Elle retoque notamment un décret qui prévoit d'accélérer l'expulsion des clandestins et désavoue l'ex-président, qui essaie d'empêcher le Congrès de convoquer un de ses conseillers, en écrivant: "Les présidents ne sont pas des rois".

Pendant son audition au Congrès, Ketanji Brown Jackson a assumé son rôle de "modèle" pour "les petites filles de tout le pays" et espéré que sa confirmation augmente "la confiance" des Afro-Américains dans le système judiciaire. Pendant deux ans, elle a été avocate dans les services de l'aide juridictionnelle à Washington, où elle a défendu des prévenus sans ressources comme qu'avocate commise d'office. La Cour suprême ne sera pas une découverte pour elle puisqu'elle a également été l'assistante du juge qu'elle remplace aujourd'hui.

Une cour qui reste conservatrice

Sauf que sa nomination ne changera pas le rapport de forces au sein de la Cour suprême. L'institution compte toujours six juges conservateurs pour trois progressistes. Tous sont nommés à vie, il n'y aura pas de renouvellement avant un certain temps.

Cette cour, qui arbitre les grands sujets comme l'avortement, le mariage homosexuel ou la peine de mort, est donc ancrée pour plusieurs années, voire plusieurs décennies du côté du conservatisme social.

Une victoire politique pour Joe Biden

Sa nomination est aussi une victoire politique pour Joe Biden : c'était l'une de ses promesses de campagne. Le président américain s'est d'ailleurs empressé de publier un selfie avec la nouvelle juge, qu'il va recevoir en grande pompe vendredi 8 avril à la maison blanche.

À vrai dire le président américain a bien besoin d'un nouveau souffle. Les démocrates sont mal partis pour les législatives de mi-mandat qui se profilent en novembre. Les États-Unis ont beau connaître un rebond économique fulgurant, l'inflation pèse sur le pouvoir d'achat des Américains et la cote de confiance du président, autour de 41, n'arrive pas à décoller.

La nomination de Ketanji Brown Jackson, "KBJ" comme l'appellent déjà les Américains, permet aux démocrates de placer juste à temps l'une de leurs pièces maîtresses. De quoi remobiliser par exemple l'électorat afro-américain, qui se sent négligé depuis le début de son mandat et à qui Joe Biden doit son élection. L'intronisation de KBJ a d'ailleurs été saluée par des figures comme Michelle Obama, le fils de Martin Luther King ou la charismatique Stacey Abrams, candidate noire au poste de gouverneure de Géorgie.

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