L'industrie pétrolière, la "solution" pour lutter contre le réchauffement climatique ? Le grand mirage du patron de la COP28
Depuis sa nomination polémique, Sultan al-Jaber a du mal à convaincre. Être à la fois PDG de la compagnie pétrolière nationale des Émirats arabes unis, l'un des principaux exportateurs de brut au monde, et président de la COP, chargée de programmer la fin de l'or noir au nom de la lutte contre le changement climatique... ça sent le léger conflit d'intérêt.
Un peu comme si les européens s'amusaient à nommer un ancien employé de Shell commissaire au climat (mais ça non plus ça n'est pas de la fiction). Pour les ONG de défense du climat, Sultan-al-Jaber va forcément donner de l'espace aux lobbyistes des combustibles fossiles, et réduire les ambitions de la conférence.
Lui dit au contraire que ça ne sert à rien de prendre pour cible l'industrie pétrolière et gazière, de marteler qu'elle fait partie du problème alors qu'elle est au cœur de la solution. Au salon de l'énergie de Dubaï hier, il a exhorté les patrons à en faire davantage et il assure qu'une vingtaine de compagnies ont pris des engagements concrets, en acceptant, par exemple, de réduire à zéro leurs émissions de méthane d'ici 2030, notamment en mettant fin au brûlage de la torche, pratique très polluante qui consiste à brûler le gaz en surface au lieu de le capturer.
Un double discours
Mais il ne veut pas pour autant complètement renoncer aux énergies fossiles. L'image qu'il prend, c'est que pour débrancher le monde du système énergétique actuel et mettre en place un nouveau système, il ne suffit pas juste d'appuyer sur un bouton.
La sortie des énergies fossiles est "inévitable et essentielle" c'est ce qu'il dit mais pour l'instant il faut être pragmatique, réaliste, et continuer à investir dans le pétrole pour satisfaire la demande mondiale. La compagnie de sultan al-Jaber, qui pompe quatre millions de barils de brut chaque jour espère d'ailleurs passer à cinq millions d'ici deux ans.
Sa façon de ménager la chèvre et le chou, ses ambiguïtés sont un révélateur parfait des deux approches totalement contradictoires de la manière dont il faut lutter contre le réchauffement climatique. D'un côté les pays qui mettent l'accent sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, sans nécessairement éliminer complètement les combustibles fossiles. De l'autre ceux qui réclament l'abandon du pétrole, du gaz et du charbon pour une transition rapide vers des sources d'énergie renouvelables. Les rapprocher sera tout l'enjeu de la COP28.
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