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Résultats présidentielle 2022 : entre "choc" et "seum", le regard "inquiet" de la presse étrangère sur l'élection en France

Que dit la presse étrangère sur ces résultats du premier tour de l'élection présidentielle en France ? Les journaux actent l'effondrement des deux grands partis traditionnels, les socialistes et les républicains, et s'inquiètent de voir Marine Le Pen au pouvoir.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Les bulletins de vote et les affiches d'Emmanuel Macron, La République en marche (à gauche) et de Marine Le Pen, Rassemblement national (à droite). (PHILIPPE RENAULT / MAXPPP)

"Si François Mitterrand et Jacques Chirac étaient encore en vie, ils n’en reviendraient pas" : voilà comment La Vanguardiaen Catalogne, résume le premier tour de l'élection présidentielle en France, qui voit donc un nouveau duel Marine Le Pen - Emmanuel Macron dans les urnes le 24 avril 2022  - et qui fait écho d'ailleurs à l'effondrement du bipartisme en Espagne ces dernières années. 45 ans d'alternance droite - gauche, et puis un paysage politique qui se fractionne dans lequel l'extrême droite prend de plus en plus de place.


"Le PS touche le fond", dit de son coté El Pais, historiquement proche des socialistes, et "rares sont ceux qui pensent qu’il s’en sortira sous sa forme originelle". Même constat côté conservateurs, en Espagne et ailleurs. Le score de Valérie Pécresse est tellement bas dit Le Guardian, en Grande-Bretagne, que "c'est ça, le plus gros choc de la soirée. Cela risque d'entraîner l'implosion de son parti et la France pourrait de fait se retrouver dans une position unique en Europe, un pays sans parti de droite classique.”

>> Présidentielle 2022 : suivez les réactions au premier tour dans notre direct

Marine Le Pen inquiète les européens

Le fait que Marine Le Pen arrive en deuxième position, avec un écart bien plus réduit qu’il y a cinq ans face à Emmanuel Macron, inquiète les partenaires de la France. L'Allemagne notamment. Pour le Tagesspiegel, Marine Le Pen dans le fauteuil de l'Elysée, ce serait un virage radical et la fin de l'unité européenne : sur les sanctions vis à vis de la Hongrie et de la Russie, sur le pacte vert pour le climat, sur l'Otan. Même l’historique amitié franco-allemande pourrait en souffrir. Le Pen élue, dit le quotidien berlinois, ce serait "une catastrophe comparable à celle du Brexit".


Même tonalité pour la Süddeutsche Zeitung qui voit "la France, seule puissance nucléaire du continent, siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU", au bord d'être dirigée par des "europhobes radicaux”.

Pour comprendre cet effroi, il suffit de comparer le gouffre qui sépare les résultats de ce premier tour en France à ceux des législatives allemandes de septembre.
Écologistes : 4% en France, 15% en Allemagne. Sociaux-démocrates : 2% en France, 26% en Allemagne. Extrême droite : 33% en France, 10% en Allemagne.

Beaucoup d'autres journaux, lundi 11 avril dénoncent la vraie-fausse normalité de la candidate du RN : "Marine le Pen est-elle vraiment devenue une politicienne modérée ?" "Si vous regardez son programme et ses déclarations, la réponse est non" dit le NRC Handelsblad aux Pays-Bas.

Marine Le Pen est toxique” surenchérit le Guardian. “Son projet, impliquera un coup d’État constitutionnel (...), son programme économique est impossible à mettre en œuvre. Son élection (...) ferait se déchaîner les démons racistes (...) et diviserait la France”.

Emmanuel Macron "doit maintenant se battre"

Un défi s'annonce en tout cas pour Emmanuel Macron, qui se retrouve “face au combat de sa vie”, écrit le Financial Times. Il “doit maintenant se battre”, dit la Frankfurter Alluguemeine Zeitung. Le quotidien allemand explique que le président français cumule les handicaps : il n’a plus l’avantage de la nouveauté, il n’est pas allé aussi loin qu’il l’espérait sur le plan économique et il a surtout “échoué à réconcilier les Français”.

En Italie, interrogé par la Repubblica, le plus français des politiques italiens, Enrico Letta choisit le camp de l'optimisme : "Dans l'affrontement entre souverainistes et pro-européens", dit-il, "ce sont ceux qui croient en une Europe plus unie et plus forte et non ceux qui veulent la briser qui l’emportent malgré tout".

Mais il serait sans doute plus adapté de conclure avec le magazine américain Foreign Policy qui met en avant ce mot né dans les quartiers populaires et passé dans le langage courant, ce mot qui résume parfaitement le sentiment d’insatisfaction et le mal-être qui touche toutes les classes sociales. Ce matin, à en croire le magazine, la France "a le seum".

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