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Tempête Daniel : divisée politiquement, la Libye doit faire face à des inondations meurtrières

Après avoir dévasté une partie de la Grèce, de la Turquie et de la Bulgarie, la tempête Daniel a traversé la Méditerranée. Depuis le dimanche 10 septembre c'est en Libye qu'elle provoque des inondations gigantesques. L'Est du pays est particulièrement touché.
Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Une vue de la ville de Derna, le 11 septembre 2023, en Libye à l'Est du pays, après les inondations provoquées par la tempête Daniel. (HANDOUT / ANADOLU AGENCY / AFP)

Les vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montrent des torrents de boue, d'une violence inouïe, emportant avec eux des débris de toutes sortes, des voitures retournées qui semblent aussi légères qu'un fétu de paille. Sur d'autres images on voit des immeubles et des routes balayés par des glissements de terrain.

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Deux barrages situés en amont de la ville côtière de Darna, coincée entre la Méditerranée et une chaîne de collines, ont cédé sous la pression des inondations : l'eau a déferlé sur la ville. La rivière, qui descend de la montagne pour se jeter dans la mer, a quant à elle débordé sur une cinquantaine de mètres de chaque côté de son lit.

Les constructions de la ville sont restées fragiles, très endommagées par les combats qui ont eu lieu jusqu'en 2019 entre les milices jihadistes et les hommes du général Haftar. Il n'y a pas eu de message d'alerte, pas d'évacuations. Des centaines d'habitants sont toujours bloquées sur les toits, dans l'attente des secours. Le chef du Conseil présidentiel, Mohamad al-Manfi, a déclaré les villes de Derna, Shahat et al-Bayda "zone sinistrée".

La route qui mène aux temples antiques de Cyrène, classés patrimoine mondial par l'Unesco, s'est complètement effondrée. Dans l'Est, qui regorge de champs de pétrole, la Compagnie nationale de Pétrole (NOC) a décrété "l'état d'alerte maximale" et "suspendu les vols" entre les sites de production où l'activité a été drastiquement réduite.

Un bilan impossible à établir

Les liaisons téléphoniques et les routes sont partiellement coupées : il est difficile pour les secours d'accéder aux zones sinistrées et d'établir un bilan fiable. Les autorités de l'est de la Libye ont même "perdu le contact avec neuf soldats lors des opérations de sauvetage".

L'Armée nationale libyenne parle d'au moins 2 000 morts et 5 000 disparus, mais ces chiffres ne sont confirmés ni par les ONG ni par les organisations médicales - ils sont a priori surévalués.

Le responsable du Croissant rouge à Benghazi parle malgré tout d'une "situation catastrophique". Jamais la Libye n'avait connu de phénomène météorologique aussi violent.

Appel à l'aide internationale

Le pays a décrété trois jours de deuil national et lance un appel à l'aide internationale. Plusieurs pays, dont la France, ont présenté leurs condoléances, exprimé leur "solidarité" avec le peuple libyen et offert leur aide. C'est aussi le cas de la Tunisie, de l'Algérie, des Émirats arabes unis et de la Turquie, qui, elle, envoie trois avions mardi 12 septembre au matin. À bord, on retrouve 168 secouristes, des bateaux de sauvetage, des tentes, de la nourriture, des générateurs...

Les États-Unis envisagent de contribuer aux secours avec l'ONU mais la question se pose de la coordination de l'aide humanitaire : la Libye est toujours un pays divisé. Deux gouvernements se disputent le pouvoir et chacun gère son territoire : à l'Ouest, celui d'Abdelhamid Dbeibah, qui est reconnu par l'ONU et à l'Est, celui d'Oussama Hammad, soutenu par le maréchal Haftar. La capitale Tripoli est elle-même dominée par les milices. Il n'y a plus de services publics... Le pays en réalité est plongé dans le chaos depuis plus de dix ans et la chute de Mouammar Kadhafi en 2011.

Lors d'un Conseil des ministres extraordinaire diffusé en direct à la télévision lundi 11 septembre, le Premier ministre reconnu par la communauté internationale a appelé les Libyens à faire preuve "d'unité nationale" face à la catastrophe.

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