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"Insertion", dans l'emploi des lycéens professionnels où elle est en berne

Emmanuel Macron a répété plusieurs fois un objectif, lors de sa présentation de la réforme du lycée professionnel : 100% d'insertion. Le chef de l'État veut s'appuyer sur le succès de l'apprentissage. Mais peut-il appliquer les mêmes recettes ?
Article rédigé par Thomas Giraudeau
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
La future réforme du lycée professionnel concerne plus de 600 000 élèves, soit un lycéen sur trois. (JEAN PIERRE AMET / MAXPPP)

Jeudi 4 mai, Emmanuel Macron a présenté sa réforme du lycée professionnel, depuis un des établissements de Charente-Maritime. Le chef de l'État part d'un constat : les jeunes diplômés de bac pro ont beaucoup de mal à trouver du travail, à l'inverse des apprentis et alternants. Thomas Giraudeau explique ce Mot de l'éco : "Insertion".

franceinfo : Emmanuel Macron a répété le terme "insertion" à plusieurs reprises en présentant sa réforme du lycée professionnel. Pourquoi ? 

Thomas Giraudeau : Parce qu'aujourd'hui, ces établissements, qui scolarisent un tiers des lycéens, ont de grandes difficultés à insérer leurs élèves sur le marché du travail. Selon une note des services statistiques des ministères de l'Education et du Travail, six mois après la fin de leurs études, Bac Pro en poche, à peine 40% d'entre eux ont trouvé un travail.

Et pour les élèves en CAP (pâtisserie, petite enfance, coiffure, aide à la personne, par exemple), eux aussi scolarisés en lycées pros, c'est pire. Seul un sur quatre a du travail 6 mois après son diplôme.

Cet échec de l'insertion des lycéens pros contraste avec la facilité des apprentis à trouver du travail ?

Oui, deux apprentis sur trois ont un emploi six mois après la fin de leurs études, toujours selon les ministères de l'Education et du Travail. Et encore, ce chiffre ne concerne que les apprentis de niveau CAP jusqu'au BTS.

Il exclut les étudiants en licence et en master qui suivent leur formation en apprentissage, par exemple en écoles de commerces, d'ingénieurs. Eux ne sont pas appelés apprentis mais alternants. Et ils trouvent très facilement du travail après leur diplôme.

Ce sont d'ailleurs ces étudiants dans l'enseignement supérieur, qui font le fameux succès de l'apprentissage et de ses capacités d'insertion, vanté par l'exécutif. Leur nombre a explosé, surtout depuis la crise sanitaire, où l'Etat a massivement subventionné les contrats d'apprentis. 

Aujourd'hui, est-il possible d'avoir ces avantages de l'apprentissage tout en étant lycéen professionnel ? 

Cela existe, mais dans les faits, seulement un élève de lycée pro sur 10 est aussi apprenti. C'est difficile pour eux de trouver une entreprise qui les embauche en tant qu'apprenti. Au début du lycée professionnel, les jeunes ont en moyenne 15 ans, parfois 14. Les chefs d'entreprise considèrent souvent qu'ils ne sont pas assez matures pour travailler, contrairement aux étudiants, plus âgés.

Et puis, leur niveau scolaire joue en leur défaveur. 40% d'entre eux ont une maîtrise fragile du français à l'entrée en seconde, 70% en maths. Les lycées professionnels accueillent aussi davantage d'élèves allophones, dont la langue maternelle n'est pas le français.

C'est là un des arguments des syndicats enseignants. Pour s'insérer, trouver du travail, les élèves doivent avoir des expériences professionnelles. Mais aussi un bagage scolaire minimum. Maîtriser les fondamentaux. Ils ont besoin de cours au lycée pour cela.

Le chef de l'Etat semble avoir entendu cet argument. Fin août 2022, il annoncait une augmentation de 50% de la durée des stages pour tous les lycéens professionnels. Finalement, ce sera quatre semaines de plus, en fin d'année de Terminale, et seulement pour ceux qui veulent s'insérer directement sur le marché du travail après leur Bac Pro. Les autres, qui souhaitent poursuivre leurs études en BTS, auront quatre semaines de cours intensifs pour préparer leur entrée dans le supérieur. 

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