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Les "illégaux" : l’exemple du général Skobline

Les services secrets du Kremlin devaient à des "illégaux" l’institution de certaines de leurs méthodes : l’infiltration tous azimuts, le retournement, le recours à des agents "idéologiques", recrutés notamment via les filières de l’Internationale communiste, l’usage subtil de drogues et de poisons, etc.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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  (Une photographie du général Skobline, avant 1919, tirée de "Illustrowany Kurier Codzienny")

Moscou commença à mettre au point cette organisation en dépêchant en Occident de nombreux émissaires clandestins, chargés de préparer la "Révolution mondiale".

 

Dans les années 1920, les activités d’espionnage soviétiques étaient menées par des Bolcheviks au passé mythique. Les grands agents secrets furent souvent enrôlés par le Kremlin en raison de leur engagement idéologique ou patriotique. Ils permirent à Staline d’édifier très rapidement un réseau de renseignement sans précédent dans l’histoire mondiale. 

L’affaire Skobline

L’affaire Skobline fut mise au jour par les services français du contre-espionnage à la fin des années 30. Le général Skobline fut un agent secret d’importance, dont la fibre patriotique, l’attachement inconditionnel à la grandeur de la Russie, au-delà des aléas politiques, avaient été exploités par le Kremlin pour l’enrôler.

 

Le général Skobline avait rejoint l’Armée blanche lors de la révolution bolchevique. II y commandait une division et sauva du peloton d’exécution une jeune chanteuse d’opéra, Nadejda Plevitskaïa, cantatrice de renom célébrée dans la bonne société qui la surnommait « le rossignol ». Vraie diva, mais sans ressources, elle avait été recrutée en 1918 par la police politique des Soviets pour pénétrer et surveiller les groupes de Russes blancs. Démasquée par les forces blanches, elle allait être fusillée quand le général Skobline, en preux chevalier, la secourut.

Retournement de situation

Le Kremlin eut alors une idée de génie : retourner Skobline en flattant sa mégalomanie et en tablant sur son aspiration à préserver la Russie éternelle "[du] diable et [des] étrangers ". Il parvint à ses fins, étape par étape. Skobline épousa tout d’abord Nadejda, émigra en Turquie, puis finit par s’installer en France, pour y agir comme agent de pénétration dans l’opposition russe blanche à l’étranger.

 

Membre de l’organe de direction des Russes blancs en exil, il avertissait les services soviétiques de la venue de tous les émissaires blancs envoyés en URSS ! Capturés dès leur arrivée, ceux-ci étaient exécutés sans délai.

 

Le Kremlin eut ensuite recours à Skobline pour enlever, à Paris, le général Eugène Miller, chef des Russes blancs expatriés. L’opération, après une série d’épisodes rocambolesques, finit par être menée à bien. Mais l’épouse du général Skobline, compromise, fut traduite devant la justice française et condamnée à 20 ans de prison pour complicité d’enlèvement. Quant à Skobline, il fut rapatrié à Moscou par avion.

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