"80% des lois votées à l'Assemblée sont des directives européennes" ?
Cela fait maintenant plusieurs années que ce chiffre traîne dans le débat public, relayé à la fois par les eursceptiques et les plus europhiles. Il viendrait d'une formule utilisée à la fin des années 80 par Jacques Delors dans un discours devant l'Union des syndicats britanniques : "Vers l’an 2000, 80% de la législation économique, peut-être même fiscale et sociale, sera décidé par les institutions européennes." Mais cette prédiction ne s'est jamais confirmée.
Pas 80%, mais environ 20%
D'après le secrétariat général des affaires européennes, "les textes de transposition de nature législative concernent environ 20% des mesures de transposition ". Un chiffre confirmé par plusieurs études menées ces dernières années au niveau français ou dans plusieurs autres Etats membres, et compilées dans un document publié par l'institut Notre Europe en mai 2014.
Au-delà des transcriptions simples de directives, il est difficile de mesurer avec précision l'influence de décisions ou de prises de positions prises à Bruxelles. Ceci dit, en se basant sur l'utilisation de mots-clés ("UE", "marché commun", etc.) dans les textes de lois nationales sur plusieurs années, on parvient à ces données :
Mais au-delà du chiffre de 80%, ce que semble donc vouloir dire Nicolas Bay c'est en substance : "l'Europe décide de tout dans le dos des peuples".
Dans sa déclaration, Nicolas Bay parle spécifiquement des directives européennes. Ce sont des textes qui fixent des objectifs à remplir dans un délai limité par les Etats membres. Chacun d'entre eux doit alors adopter une loi nationale pour se donner les moyens d'y arriver. En cas d'absence de loi dans les deux qui suivent la directive, la Commission européenne peut engager des poursuites. La France a actuellement un déficit de transcription de 0,7%, dans la moyenne européenne.
Sauf que...
D'abord, l'écrasante majorité des directives européennes sont adoptées selon la 'procédure législative ordinaire". Cela veut dire que ces textes sont élaborés conjointement par le Conseil européen et le Parlement européen, où siège l'eurodéputé Nicolas Bay depuis son élection au suffrage universel en 2014. En clair : les représentants des citoyens européens ont leur mot à dire sur les directives.
Ensuite, tout n'est pas du ressort de l'Union européenne. L'enseignement, le logement, la protection sociale, la fiscalité, les questions de défense ou de sécurité sont pour l'essentiel du ressort des Etats membres, de la souveraineté nationale. En ce qui concerne les sujets typiquement européen, la part de textes européens qui aboutissent dans les législations nationales est extrêmement variable en fonction des sujets.
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