Le vrai du faux. Taxe sur les billets d'avion, inaction climatique... On a vérifié les propos d'Emmanuel Macron sur franceinfo
Le président de la République Emmanuel Macron a appelé à créer une "taxation internationale" pour financer la lutter contre la pauvreté et le dérèglement climatique pendant son interview de vendredi 23 juin sur franceinfo, RFI et France 24, dans le cadre du sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Le "vrai du faux" revient sur deux déclarations du chef de l'Etat.
1La France est-elle le seul pays à taxer les billets d'avion ?
Selon Emmanuel Macron, les taxes prises à l'échelle d'un seul pays ne fonctionnent pas. Il a regretté la solitude parfois de la France dans l'application de certaines taxes : "On nous dit qu'il faut une taxation sur les billets d'avions, il y a eu un rapport. On le fait en France ! Qui d'autre le fait ? Ça ne marche pas quand on le fait tout seul", a-t-il déclaré. Mais la France est-elle le seul pays à taxer les billets d'avion ?
Non, c'est faux. Le président fait référence à la taxe de solidarité sur les billets d'avion, aussi appelée "taxe Chirac", créée par la France en 2006, non pas pour lutter contre le réchauffement climatique, mais pour aider à financer la santé dans les pays en développement. Les sommes récoltées via cette taxe sont entièrement reversées à Unitaid, une agence de l'ONU. Après la France, huit autres pays ont décidé de l'appliquer, selon Me Stéphane Monod, avocat spécialisé dans le droit aérien : le Cameroun, le Chili, la République démocratique du Congo, Madagascar, le Mali, Maurice, le Niger et la Corée du Sud.
Par ailleurs, le spécialiste affirme à franceinfo que cinq autres pays ont adopté des taxes similaires pour financer l'aide au développement via des organismes internationaux : l'Allemagne, l'Autriche, la Norvège, le Royaume-Uni et la Suède. Cela monte donc à 14, au total, le nombre de pays à appliquer ce genre de taxe sur les billets d'avion. 14 sur plus de 190 pays dans le monde. On peut reconnaître à Emmanuel Macron que "les pays ne se bousculent pas au portillon" pour adopter cette taxe, selon l'expression de Stéphane Monod.
2 Les condamnations pour inaction climatique ne concernent-elles que les années 2015-2018 ?
Emmanuel Macron s'est aussi félicité des avancées de la lutte contre le réchauffement climatique. "On fait des efforts en France et d'ailleurs, ça nous est reconnu puisque l'inaction climatique valait pour la France sur la période 2015-2018. Depuis, nous n'avons pas été condamnés pour inaction climatique", a-t-il affirmé.
Les propos du président sont vrais mais trompeurs. Emmanuel Macron faisait référence aux deux condamnations de la France pour n'avoir pas assez réduit ses émissions de gaz à effet de serre et ne pas être sur la bonne voie pour respecter ses engagements pris dans l'Accord de Paris sur le climat. L'une a été prononcée par le tribunal administratif de Paris dans ce qui a été appelé "L'Affaire du siècle" et l'autre par le Conseil d'Etat dans une procédure initiée par la commune de Grande-Synthe qui s'estime menacée par la montée des eaux. Ces deux condamnations ont été prononcées en 2021 et concernent en effet toutes les deux principalement la période allant de 2015 à 2018, comme l'a affirmé le chef de l'Etat, arrivé au pouvoir en mai 2017.
Sauf que, dans sa décision, le Conseil d'Etat avait aussi inclus des observations négatives sur les années suivantes, en 2019 et 2020. Il avait demandé au gouvernement de revoir sa copie et de donner des gages qu'il allait respecter ses engagements.
Deux ans plus tard, même si la France n'a pas été de nouveau condamnée, l'action du gouvernement pour le climat est toujours jugée "insuffisante" par le Haut Conseil pour le Climat comme par le Conseil d'Etat. Dans une nouvelle décision, prise en mai 2023, celui-ci ordonne au gouvernement de faire mieux pour la planète. Certes, ce n'est pas une condamnation, mais c'est tout de même une injonction faite par la justice.
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