Séisme en Turquie : le pont des Dardanelles a-t-il tenu grâce à la technologie chinoise ?
L'ambassade de Chine en France s'est vantée de la résistance de ce pont, après le séisme qui a violemment frappé la Turquie et la Syrie.
Plus de 35 000 personnes ont été tuées par un violent séisme, de magnitude 7,8, en Turquie et en Syrie le 6 février 2023. De nombreux bâtiments se sont écroulés à cause des secousses, mais dix jours plus tard, le pont du détroit des Dardanelles est toujours debout. L'ambassade de Chine en France dit que c'est grâce à elle. Mais c'est complètement faux.
L'ambassade de Chine vante la "China Tech"…
Dans un tweet publié lundi et aujourd'hui supprimé mais dont on peut retrouver la trace dans les archives d'internet, l'ambassade de Chine en France a écrit que "le pont construit par la Chine en Turquie a résisté au tremblement de terre" et a ajouté le mot-dièse "China Tech", pour vanter la technologie chinoise. Le texte est accompagné d'une vidéo montrant les différentes étapes de construction de l'édifice.
En parallèle, un article a été publié sur son site internet, qui assure que l'édifice a été "construit en partenariat avec la société chinoise Sichuan Lu Qiao" et qu'il "a pu résister à cette rude épreuve grâce à sa conception antisismique ainsi qu'à sa qualité de construction". Cet article a aussi été supprimé depuis mais a également été enregistré dans les archives du net.
… mais le pont n'est pas chinois et il n'était pas menacé
Alors certes, le pont que montre la vidéo existe bel et bien – il relie l'Europe et l'Asie en passant au-dessus du détroit des Dardanelles – mais en vérité aucune entreprise chinoise n'a été mise à contribution. Selon Structurae.net, une base de données internationale à destination des ingénieurs des ponts et du génie civil, les plans de l'édifice ont été dessinés par l'entreprise turque Tekfen Insaat Ve Tesisat A.S, la société de conseil danoise Cowi a étudié leur faisabilité, et quatre entreprises de construction se sont associées pour bâtir le pont : les turques Limak et Yapi Merkezi et les sud-coréennes DL E&C et SK ecoplant, comme l'indique le site internet du pont. Les joints de chaussée ont été faits par l'entreprise germano-américaine Maurer.
La deuxième fausse information, dans le tweet de l'ambassade chinoise, concerne les risques que le pont encourait. Il se situe à plus de 1 000 kilomètres de l'épicentre du séisme et à des centaines de kilomètres des dernières zones qui ont été touchées par les secousses. Trop loin, il n'a donc pas eu à "résister" au tremblement de terre.
L'ambassade de Chine en France a finalement retiré son tweet et dépublié son article au bout de quelques heures.
Une ambassade coutumière des fausses informations
C'est loin d'être la première fois que l'ambassade de Chine en France est épinglée alors qu'elle diffuse de fausses informations. Elle l'a été plusieurs fois pendant la pandémie de Covid-19, notamment. L'ambassadeur Lu Shaye a même été convoqué par Jean-Yves Le Drian en avril 2020, alors qu'il était ministre des Affaires étrangères, pour répondre d'insultes à l'encontre d'un chercheur indépendant et de parlementaires français qui critiquaient la gestion du virus par Pékin.
Dans un article publié sur son site internet en avril 2020 – lui aussi supprimé depuis mais dont on a retrouvé les traces – intitulé "Rétablir les faits distordus", l'ambassade affirmait que la Chine était "sortie victorieuse de son combat contre l'épidémie" mais que "des médias qui se prennent pour des parangons d'impartialité et d'objectivité, des experts et des politiciens de certains pays occidentaux [semblaient] plus soucieux de calomnier, de stigmatiser et d'attaquer la Chine" en disant qu'elle mentait.
L'ambassade de Chine a aussi déjà publié des tweets antisémites et complotistes, avant de dire, une fois, que son compte avait été piraté, comme franceinfo vous l'expliquait déjà en mai 2020. L'ambassade nie également en permanence que des Ouïghours ont été envoyés en masse dans des camps de rééducation en Chine, malgré les preuves.
Tous ces tweets servent à diffuser la propagande de Pékin et à alimenter la guerre de communication de la Chine contre l'Occident sur les réseaux sociaux.
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