Vrai ou faux
Législatives 2024 : les niches fiscales représentent-elles "78 milliards d'euros de manque à gagner pour l'État", comme l'affirme Fabien Roussel ?

Dans sa campagne pour les législatives, le Nouveau Front Populaire propose de financer une partie de son programme en supprimant des niches fiscales. "C'est 78 milliards d'euros de manquer à gagner pour l'État", affirme le communiste Fabien Roussel. C'est plutôt vrai, 81 milliards précisément sur l'année 2023. Ces niches fiscales servent notamment à encourager des secteurs économiques, mais certaines sont critiquées.
Article rédigé par Lise Roos-Weil
Radio France
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Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français, le 19 juin 2024 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Les niches fiscales dans le viseur du Nouveau Front populaire. Pour financer une partie de son programme, l'alliance de gauche et écologiste propose de supprimer certaines niches fiscales. Ces réductions, exonérations ou crédits d'impôt font baisser les impôts des particuliers et des entreprises, et donc les recettes de l'État. "Les niches fiscales, c'est 78 milliards d'euros de manque à gagner pour l'État", affirme le secrétaire national du parti communiste Fabien Roussel, sur franceinfo, mercredi 19 juin Vrai ou faux ?

Quelque 81 milliards d'euros de manque à gagner sur l'année 2023

C'est vrai. Plus précisément, le coût des niches fiscales est évalué à 81,3 milliards d'euros pour l'année 2023 et s'est élevé à 85,6 milliards d'euros en 2022, comme le ministère de l'Économie le précise dans les annexes du projet de loi de finance 2024. En tout, l'État comptabilise 467 niches fiscales en France, dans divers domaines et qui bénéficient à différents secteurs économiques ou catégories de ménages. Ce sont des allègements fiscaux tout à fait légaux, prévus dans la loi.

La niche fiscale la plus coûteuse est le crédit d'impôt recherche, à destination des entreprises. Ca représente 7,2 milliards d'euros en moins dans les caisses de l'État en 2023. Comme son nom l'indique, ce dispositif vise à encourager les entreprises à investir dans la recherche et le développement. Deuxième niche fiscale la plus coûteuse, et qui concerne beaucoup de monde : le crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile. Une partie des heures de ménage, de garde d'enfant ou d'aide à domicile peuvent être déduites des impôts. Une enveloppe de 5,9 millards d'euros en 2023. L'objectif cette fois est d'aider les ménages et de réduire le travail au noir. Autre exemple de niche fiscale : les avantages fiscaux dans l'immobilier. Vous achetez un bien neuf par exemple pour le louer, vous pouvez avoir une réduction d'impôts. L'objectif est de soutenir le bâtiment. Les niches fiscales sont souvent mises en place pour soutenir un secteur économique, ou pour aider une catégorie des ménages.

Des niches fiscales pas toujours efficaces

Mais elles sont toutefois critiquées. D'abord parce qu'elles ne sont pas toujours jugées efficaces. La Cour des comptes reconnaît, dans son dernier rapport publié en avril 2024, qu'il faut mieux évaluer la pertinence de chaque niche fiscale. "La Cour fait le constat d’une articulation insuffisante entre les dépenses fiscales et les objectifs des politiques publiques auxquelles elles sont supposées concourir", écrivent les auteurs. Certaines entreprises bénéficiaires sont notamment pointées du doigt par des partis politiques. 

Dans son programme, le Nouveau Front populaire propose de supprimer les "niches fiscales inefficaces, injustes et polluantes". De son côté, le Rassemblement national a cité en particulier la niche fiscale des armateurs. Une avantage déjà critiqué à plusieurs reprises ces dernières années par les différents parties d'opposition.

La niche fiscale des armateurs pointée du doigt

Depuis vingt ans maintenant, les navires bénéficient d'un allégement fiscal, pour résister à la concurrence asiatique. Ils paient une taxe forfaitaire au tonnage, qui réduit considérablement leurs impôts. Or, depuis la crise du covid, le secteur du fret maritime enregistre des bénéfices records.

Résultat : grâce à cette niche fiscale, le secteur a économisé plus de cinq milliards d'euros d'impôt en 2023, pour seulement 57 entreprises, comme précisé dans les annexes du projet de loi de finance 2024. Parmi elles, on retrouve le géant marseillais CMA-CGM, qui a engrangé plus de 23 milliards d'euros de bénéfices en 2022, en pleine crise covid. Son patron, Rodolphe Saadé, déjà auditionné au Sénat à ce sujet, défend son avantage fiscal. Il assure que les bénéfices sont réinvestis, notamment dans la transition écologique, et répète que le secteur du fret maritime reste très volatile.

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