Vrai ou faux
Logements indignes à Marseille : le maire Benoît Payan a-t-il "envoyé chez le procureur des centaines" de marchands de sommeil ?

Invité de franceinfo, le maire de Marseille Benoît Payan a assuré qu'il luttait sans relâche contre les marchands de sommeil, six ans après le drame de la rue d'Aubagne. Le nombre de signalements et de poursuites a, c'est vrai, nettement augmenté ces dernières années.
Article rédigé par Lise Roos-Weil
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Benoît Payan, maire de Marseille, le 15 octobre 2024. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"Moi, ces gens-là je les envoie chez le procureur", lance mardi 15 octobre, sur franceinfo, le maire de Marseille, Benoît Payan, en parlant des marchands de sommeil. Ces propriétaires qui louent des logements indignes : trop petits, trop humides ou encore sans électricité aux normes. Six ans après le drame de la rue d'Aubagne, quand deux immeubles se sont effondrés dans le quartier de Noailles, à Marseille, faisant huit morts, et alors que le procès doit s'ouvrir le 7 novembre prochain, le maire de la ville assure qu'il lutte sans relâche contre ce fléau. Quelque 40 000 logements sont considérés comme "indignes" à Marseille, selon la Fondation Abbé Pierre. "Quand on est arrivés, en tout cinq marchands de sommeil avaient été envoyés chez le procureur de la République, nous c'est des centaines", insiste l'élu sur franceinfo. Vrai ou faux ?

Nettement plus de signalements

C'est vrai qu'il y a eu une nette accélération des signalements et des poursuites contre les marchands de sommeil à Marseille depuis 2019, après l'effondrement des immeubles rue d'Aubagne. Depuis le début du mandat de Benoît Payan, en 2020, 160 signalements auprès du procureur de la République ont été effectués, précise la mairie auprès de franceinfo. L'élu exagère donc quand il parle de "plusieurs centaines", mais cela reste largement supérieur au nombre de signalement réalisés auparavant. L'ancienne municipalité, sous Jean-Claude Gaudin, n'avait fait "pratiquement aucun signalement", précisent des juges et procureurs interrogés par l'AFP en février 2024.

Aurélien Leroux, avocat de nombreuses victimes de logements indignes et d'associations, l'a bien constaté : "la volonté politique est là", indique-t-il à franceinfo. Le nombre de signalements a nettement augmenté. Le parquet doit même "prioriser" les dossiers, en se concentrant sur les cas "les plus graves".

Des condamnations prononcées

"Une dizaine de condamnations" sont prononcées chaque année, précise le vice-procureur adjoint de Marseille Jean-Yves Lourgouilloux. "Il y a de plus en plus de marchands de sommeil renvoyés devant la justice", constate également Aurélien Leroux, qui voit ses dossiers "plus vite pris en charge". Mais il y a encore de nombreuses victimes qui ne déposent pas plainte, parce qu'elles ne connaissent pas leurs droits, notamment les locataires en situation irrégulière. Les délais de traitement restent par ailleurs longs, à cause du nombre d'affaires : "Un dossier met environ deux ans à arriver" devant le tribunal, précise Jean-Yves Lourgouilloux.

Les sanctions pénales contre les marchands de sommeil ont été alourdies en avril 2024, avec l'adoption de la loi sur l'habitat dégradé. Ils risquent désormais sept ans de prison et 200 000 euros d'amende, contre cinq and de prison et 150 000 euros d'amende auparavant. La peine complémentaire d'interdiction d'acquérir un bien immobilier pour ces bailleurs condamnés est aussi alourdie. La durée de l'interdiction est portée à 15 ans, contre dix ans avant. Certains procès symboliques ont marqué les esprits. En janvier 2024, un ancien policier, propriétaire de 122 logements insalubres, a été condamné à cinq ans de prison, dont quatre ans fermes.

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