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3 X Manon: La maturité d'une démocratie se juge à sa justice

Récompensée par le Fipa d'Or 2014 au festival de Biarritz en janvier, la mini-série Trois Fois Manon permet au scénariste et réalisateur Jean-Xavier de Lestrade de plonger dans l'univers de l'éducation fermée. Les trois épisodes de 52 minutes, qui seront diffusés le 10 avril sur Arte, sont réalisés avec une grande sensibilité. Un naturel étonnant se dégage de chaque scène au point de parfois faire penser à un documentaire. A voir absolument.
Article rédigé par Bertrand Dicale
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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C ertaines récompenses sont totalement méritées. Le Fipa d'Or 2014 qui a été attribué à Trois Fois Manon de Jean-Xavier de Lestrade vient saluer une mini-série ambitieuse, exigeante, originale et portant en elle une intense émotion. On est à mi-chemin du documentaire et de la fiction, on oscille entre un réalisme fort, voulu et assumé, et une histoire qui fait la part belle aux comédiennes - puisque la majorité des personnages sont des femmes ou des adolescentes.

En 2001, Jean-Xavier de Lestrade avait livré un documentaire passionnant et qui avait fortement marqué les esprits, "Un Coupable Idéal ", dans lequel il racontait comment un adolescent noir de quinze ans s'était retrouvé à tort accusé du meurtre d'une touriste blanche à Jacksonville en Floride. On y voyait le combat de son avocat pour le disculper et les méthodes peu recommandable de la police locale.

On avait le sentiment d'être dans un thriller, une fiction brute et brutale, sans concession. On avait le sentiment de faire un rêve éveillé. Avec Trois Fois Manon, Jean-Xavier de Lestrade raconte une histoire mais le travail de documentation, de recueil de témoignages, de repérage avant l'écriture assurent un réalisme marqué à la série.

Grosses larmes

On suit les aventure de Manon, 15 ans, adolescente rebelle, en proie à une mère ultra-possessive, "toxique" comme on dit, à l'égoïsme dévastateur, incarnée par Marina Foïs. L'actrice est tout à fait effrayante dans ce rôle. De même que la jeune Alba Gaia Bellugi dans celui de Manon.

La jeune fille se trouve envoyée dans un centre éducatif fermé avec d'autres gamines comme elle. C'est là qu'elle va apprendre qui elle est vraiment, là qu'elle va identifier et avouer l'origine de sa souffrance. Là qu'elle va canaliser sa violence. Le fait que les personnages principaux soient des filles et non des garçons ajoute à la subtilité du récit. Les choses ne peuvent pas être dites de la même façon parce qu'elles ne sont pas les mêmes et elles sont beaucoup moins attendues.

La réussite de la série tient en grande partie à l'exigence extrême de son réalisateur qui n'a pas hésité à pousser les comédiennes au bout d'elles-mêmes afin qu'elles livrent les sentiments qui les habitaient, qu'elle ne jouent plus mais qu'elles vivent la scène. C'est notamment le cas du plus beau passage de la série, la répétition d'un spectacle de marionnettes qu'on regarde en laissant couler de grosses larmes sur ses joues.

On peut regretter que les trois épisodes soient diffusés en une seule soirée. D'un autre côté, on est totalement immergé dans ce qui est, en fait, un long film, et l'émotion ne lâche pas le spectateur.

 

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