Espagne – Amérique latine : un lien jamais rompu ?

En Espagne, le chef du gouvernement Pedro Sánchez, malgré la crise migratoire qui frappe son pays, a estimé devant les députés que l’immigration était une chance pour la prospérité de la péninsule ibérique. "Nous, les Espagnols, nous sommes des enfants de l’immigration. Nous n’allons pas être les parents de la xénophobie".
Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
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Temps de lecture : 5 min
Le Premier ministre Pedro Sanchez, le 9 octobre 2024 devant les députés espagnols à Madrid, et son discours sur la politique migratoire de l'Espagne. Pour le premier semestre 2024, ce sont "44.000 Vénézuéliens qui sont arrivés en Espagne. Le Venezuela aujourd'hui, c'est pratiquement 400.000 personnes du côté de l'Espagne", souligne Juan Jose Dorado. (EUROPA PRESS NEWS / GETTY IMAGES)

Focus aujourd'hui dans Micro européen sur l'Espagne, et en compagnie de Juan Jose Dorado, correspondant espagnol à Paris.  

franceinfo: On en parle peu, mais il se trouve que l'Espagne accueille de plus en plus de réfugiés latino-américains, Colombiens, Nicaraguayens, Vénézuéliens, l'Espagne se "réouvre-t-elle" vers l’Amérique latine ?...   

L'Espagne est toujours restée ouverte vers l'Amérique latine. Ce qui change effectivement, c'est la géopolitique, parce qu'il y a quelques années, l'Espagne accueillait beaucoup de Cubains. Maintenant ce sont beaucoup de Vénézuéliens ; à un moment donné, c'était beaucoup d'Argentins. Et puis il y avait des Nicaraguayens, des Péruviens, des Équatoriens, des Colombiens, et tout ça parce que ça dépendait aussi de la géopolitique américaine, des relations, et des crises à l'intérieur de certains pays. Alors c'est vrai que ces dernières années, il y a beaucoup, beaucoup de Vénézuéliens qui sont venus, la plupart des opposants au régime actuel.  

Et l'Espagne est dirigée par un Premier ministre socialiste…  

Oui, par un Premier ministre socialiste, mais ce qu'il faut comprendre, dans le cas du Venezuela, c'est très particulier parce que ça a commencé avec Chavez, et cela a continué, s’est accentué avec le gouvernement de Nicolas Maduro. Donc, rien que dans le premier semestre de cette année, 44.000 Vénézuéliens sont arrivés en Espagne. Le Venezuela aujourd'hui, c'est pratiquement 400.000 personnes du côté de l'Espagne. Mais il y a deux types d'immigration. Il y a celle qui est "politique", et il y a aussi une immigration très forte, économique, essentiellement les Equatoriens, Péruviens et Colombiens.  

Quel est le ressenti des Espagnols face à ces arrivées d'Amérique du Sud ?

Alors c'est un peu particulier, déjà dans les années 90, il y avait un rejet assez systématique des Latino-Américains qui arrivaient en Espagne. On les appelait "espaldas mojadas", les épaules mouillées, parce qu’ils arrivaient par la mer, en bateau. Par la suite, le regard a beaucoup changé, et ces derniers temps, il y a un regard très particulier vers les Vénézuéliens qui en Espagne bénéficient d'un régime particulier, à cause de la situation politique au Venezuela, la plupart effectivement ne sont pas soumis au régime de n'importe quel étranger.

En fait, ils n’ont pas à demander l'asile, ils sont dans une situation de protection particulière par rapport au Venezuela. Beaucoup d'Espagnols comprennent effectivement que l'on donne une certaine protection à ce type de migration politique, qui est d'ailleurs aussi une émigration riche. Beaucoup de riches Vénézuéliens ont acheté énormément de biens immobiliers, du côté notamment de Madrid, de l'Espagne en général, mais de Madrid en particulier. Donc le regard est plus ou moins un regard intéressé.

Après, c'est vrai que l'Espagne, pour les nouveaux arrivants, Vénézuéliens, Colombiens, beaucoup, beaucoup de monde, ça commence à être un peu plus compliqué parce que l'Espagne a du mal, comme la plupart des pays européens avec l'immigration, soit d'Amérique latine ou du Maghreb. Le Maghreb, c'est d'abord la population la plus importante en 2024, suivie des Colombiens et des Vénézuéliens.  

Toujours pas d'Argentins ?

L'Argentine, c'est un cas très particulier, c'est pour cela que je vous parlais de géopolitique. L'Espagne accueille notamment Edmundo Gonzalez, le candidat de l'opposition face à Monsieur Maduro et qui a dû s'exiler en Espagne. Les relations du côté du Venezuela ne sont pas très claires, mais n'oubliez pas en revanche qu'effectivement vous avez parlé des Argentins, l'Espagne a retiré son ambassadeur en Argentine.

Il n'y a pas d'ambassadeur d'Espagne en Argentine parce que l'Espagne considère que Mr Milei, le président argentin, avait insulté le président du gouvernement, Mr Sanchez et sa femme, et donc l'Espagne a retiré son ambassadeur. Il y a des Argentins en Espagne depuis très longtemps, ils s’appellent "les Parisiens de l'Amérique latine", mais les relations entre nos deux pays sont très, très, très compliquées. 

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