Que se passe-t-il dans les îles britanniques ?
Focus sur la zone "Manche, mer d'Irlande et mer du Nord", non pas côté météo mais sur un plan politique. Deux démissions de Premier ministre et un troisième qui est menacé par son opposition. Analyse de la situation avec le plus parisien des journalistes britanniques, Philip Turle.
franceinfo : Commençons par la démission du Premier ministre écossais Humza Yousaf, du parti nationaliste écossais. Pourquoi part-il ?
Philip Turle : Le Scottish National Party, le SNP indépendantiste, est au pouvoir depuis un an grâce à une coalition formée avec les Verts écossais. Or, les deux formations ne s'entendent plus sur la politique à suivre face au réchauffement climatique. Humza Yousaf a donc mis les Verts à la porte. Ces derniers ont réclamé un vote de défiance vis-à-vis du Premier ministre qui, pour échapper à un résultat négatif, a préféré jeter l'éponge lui-même. En attendant les élections législatives d’octobre, l'ancien dirigeant du SNP au début des années 2000, John Swinney, tient la boutique.
À Londres, le premier ministre conservateur Richi Sunak suit de près cette situation. Il sait qu'aux prochaines élections législatives en Grande-Bretagne, probablement au mois d'octobre, son parti va perdre presque partout. Il préfère ainsi ne pas voir des élections anticipées en Écosse maintenant, parce que cela ferait encore monter le Parti travailliste, largement favori dans les sondages.
D'autant que les dernières élections municipales ont été favorables aux Travaillistes ?
Oui, un raz-de-marée ! Et Sadiq Khan, le maire travailliste de Londres, a été réélu pour un troisième mandat. Tout cela est de mauvais augure pour les conservateurs, au pouvoir depuis 2010 avec 5 premiers ministres. Tout le monde se souvient de Boris Johnson, tout le monde se souvient du Brexit dont les conservateurs ont été responsables. Tout le monde se rappelle de Liz Truss, la catastrophe que cela a été. Rishi Sunak est sans doute le dernier d'un règne chaotique au bilan post-Brexit très controversé. Beaucoup de Britanniques ont le sentiment d'avoir été lésés sur ce qu'ils ont obtenu.
En République d'Irlande, là aussi, le Premier ministre a démissionné ?
La République d’Irlande, qui n'a rien à voir avec le Royaume-Uni – c'est un État membre de l'Union européenne – est aussi dans la tourmente. Léo Varadkar est un jeune Premier ministre. Il s'en va pour des raisons personnelles, mais aussi en raison des résultats du référendum pour une révision de la Constitution (qui date de 1937) : ce fut pour lui un échec cuisant. Le peuple irlandais a rejeté aux deux-tiers sa proposition d'améliorer la condition des femmes pour leur donner un statut moderne. Homosexuel, dynamique, Léo Varadkar se retrouve face à une Irlande rétrograde sur les mœurs, ce qui n'est pas tenable pour lui. Il a été remplacé par Simon Harris, qui prend sa place jusqu'aux prochaines élections, probablement en 2025.
Et, juste pour compléter, en Irlande du Nord (province protestante pro britannique), on a pour la toute première fois une première ministre catholique Michelle O'Neill. Elle est issue de Sinn Féin, l’aile politique de l'armée républicaine irlandaise (IRA) qui fut à l'origine d'une guerre civile que la Grande-Bretagne a connue avec l'Irlande du Nord pendant 30 ans. Tout cela est très insolite.
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