Information : les menaces des dictatures sur les journalistes se veulent de plus en plus visibles et dissuasives
L'organisation RSF (Reporters sans frontières) a interpellé les autorités anglaises, mercredi 17 avril, pour que les journalistes iraniens, qui seraient poursuivis à distance par le régime des Mollahs, soient mieux protégés sur le sol britannique. Pour comprendre le problème, il faut remonter à fin mars, lorsqu'un journaliste de la chaîne privée Iran International TV a été agressé au couteau près de son domicile, à Londres, et a dû être hospitalisé pour une blessure à la jambe. Ses agresseurs ont pu prendre la fuite. Le journaliste a affirmé avoir été pris pour cible en raison de son travail pour cette chaîne, qui émet en farsi, et qui est classée comme organisation terroriste par Téhéran.
Menaces, harcèlement, et effet dévastateur sur le moral
Ce journaliste iranien n'est pas le seul à être concerné. Selon un rapport de l'organisation Reporters sans frontières, près de 90% des journalistes iraniens interrogés ont fait l'objet de menaces en ligne ou de harcèlement ces cinq dernières années au Royaume-Uni, avec un impact "dévastateur" sur leur santé mentale. De plus, les femmes sont particulièrement visées. Elles reçoivent des images à caractère sexuel, des menaces de mort ou de viols, elles sont aussi harcelées avec des "fake news", qui visent à ternir leur réputation. C'est une méthode classique et connue des Mollahs, qui aiment s'attaquer à la réputation des opposants, et notamment des femmes. En 1980 déjà, ils avaient condamné à mort l'ancienne ministre de l'Éducation du Shah d'Iran, au terme d'un procès où elle avait été accusée de prostitution.
L'intervention et la menace en territoire étranger sont une méthode classique de pression, utilisée par de nombreuses dictatures. C'est une grande spécialité des autorités chinoises, qui aiment poursuivre leurs opposants partout dans le monde. On l'a aussi vu dernièrement avec les Russes, qui sont accusés d'avoir pourchassé leurs opposants jusque dans les pays baltes. Une technique utilisée également par les Iraniens, qui harcèlent, suivent et agressent leurs victimes sur des territoires étrangers. Ils sont également adeptes des menaces aux familles restées en Iran.
Des méthodes au grand jour qui veulent produire de l'autocensure
Bien sûr, cela a toujours plus ou moins existé. Mais ce qui a changé, c'est qu'auparavant, ce genre de chose se faisait de façon cachée. Aujourd'hui il n'y a plus de gêne, qu'importe si cela se sait et même, au contraire, cela participe à entretenir un climat de peur. Cela peut aboutir à de l'autocensure pour les journalistes les plus vulnérables.
D'une façon générale, de plus en plus de journalistes du monde entier se retrouvent exposés et en danger, et leur situation se détériore un peu partout. Mardi dernier, Reporter sans frontières lançait un appel pour protéger les journalistes et médias haïtiens. Depuis 2022, au moins six journalistes ont été tués en Haïti en raison de leur activité professionnelle. Et on peut ajouter aussi ceux qui sont simplement agressés ou kidnappés. À Hong Kong, une représentante de RSF a été détenue, avant d’être expulsée pour être venue assister au procès de Jimmy Lai, figure connue de la dissidence. On peut ajouter encore à cette triste liste le sort des journalistes qui tentent de raconter l'horreur de ce qui se passe à Gaza. On peut évoquer l'arrestation de cette journaliste burundaise détenue depuis le 15 avril par les services de renseignement de son pays, ou le cas d'un journaliste algérien de l'hebdomadaire Jeune Afrique, qui explique avoir été refoulé samedi dernier par les autorités algériennes, puis expulsé vers Paris après avoir été interrogé sur ses articles.
Ces exemples sont ceux de la semaine écoulée, et évidemment la liste est loin d'être exhaustive. Le droit à l'information se réduit comme peau de chagrin et aucun pays n'y échappe.
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