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L'Australie quitte le projet chinois des "Nouvelles routes de la Soie", un revers pour Pékin

Le ton monte entre les deux pays, après la décision des Australiens d’annuler un accord commercial avec Pékin dans le cadre du très ambitieux programme chinois des "Nouvelles routes de la Soie". 

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La place Tiananmen à Pékin pendant une visite officielle du chef d'Etat australien, en 2011. (FREDERIC J. BROWN / AFP)

C’est un revers symbolique important pour Pékin et un révélateur : les ambitions commerciales expansionnistes de la Chine provoquent de l’irritation. Le gouvernement australien a décidé, ce mercredi 21 avril, d’annuler deux contrats passés avec Pékin, par l’une des régions du pays, l’État de Victoria dans le cadre du programme chinois des "Nouvelles routes de la Soie". Les deux contrats, qui dataient de 2018 et 2019, fixaient simplement un cadre de coopération. Ils donnaient la possibilité à la Chine d’investir dans la région, et aux entreprises du Victoria de participer aux projets chinois à l’étranger.

"Ce type d’accord est utilisé par Pékin à des fins de propagande"

Il n’y avait pas de projet précis à ce stade, il s'agissait simplement de deux accords cadre parmi les milliers initiés par la Chine depuis sept ans pour développer ses routes commerciales dans le monde, en proposant de construire des ports, des chemins de fer, des centrales électriques. Mais le gouvernement central australien a quand même décidé d’invalider ces accords au nom des "intérêts nationaux supérieurs". Il considère que cette collaboration n’est pas compatible avec la politique étrangère de l’Australie parce que "ce type d’accord est utilisé par Pékin à des fins de propagande".

Des relations sino-australiennes très dégradées

Les relations entre les deux pays ne cessent de se dégrader depuis trois ans. L’Australie se méfie de la Chine. Elle a d’abord exclu le géant Huawei de la construction de son réseau de téléphonie mobile 5G. Puis elle a dénoncé la répression à Hong Kong et a demandé, avec les États-Unis, une enquête internationale sur les origines du coronavirus. La Chine a répliqué en poussant les journalistes australiens présents sur son sol à quitter le pays. Il n’y a plus aujourd’hui un seul média australien en Chine, une première depuis 50 ans. Pékin a aussi multiplié les mesures de rétorsion économique contre plusieurs produits australiens, en particulier le vin et l’orge. Aujourd’hui, après l’annulation de ces contrats, la Chine menace implicitement de nouvelles représailles. Mais sa marge de manœuvre est limitée, parce que la principale importation chinoise venue d’Australie, c’est le fer. Et la Chine en a besoin pour faire fonctionner sa sidérurgie. 

C’est donc un coup d’arrêt symbolique pour ce projet gigantesque des "Nouvelles routes de la Soie". Mais cela reste symbolique, parce que ça ne remet pas en cause les milliers de contrats signés par les entreprises chinoises depuis sept ans un peu partout dans le monde.143 pays sont déjà concernés, dont par exemple les Philippines, l’Indonésie, l’Égypte, le Nigeria ou le Chili. En Europe, le port du Pirée en Grèce, ou celui de Gênes en Italie ont également signé. Au total, des centaines de milliards de dollars ont déjà été dépensés par la Chine, et ça ne va pas s’arrêter là.

Mais ce retrait australien montre qu’il est possible de dire "Non" à Pékin. Et de nombreux pays s’interrogent sur le risque de se retrouver financièrement pieds et poings liés à la Chine. Par ailleurs, les infrastructures créées par Pékin ne créent pas toujours beaucoup d’emplois locaux et ne sont pas réputées particulièrement vertueuses en termes d’environnement.    

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